Installé dans la ville lumière depuis 2005, Alex Stuart, le plus parisien des guitaristes australiens (et réciproquement !), vient de sortir son cinquième opus, Refuge, en juin. Une belle occasion de partir à la découverte de ce guitariste passionné par le jazz, mais pas que…
La musique
À la base je voulais jouer de la batterie, mais mon père, qui s’est peut-être dit que ça allait faire moins de bruit, a suggéré que j'apprenne à jouer de sa vieille guitare acoustique à la place. J’ai essayé et ça a été le coup de foudre ! Bon, mes parents ont quand même fini par avoir une batterie dans la maison peu de temps après, car nous y répétions avec mon groupe de grunge !
J’ai pris des cours de guitare assez rapidement et me suis tout d’abord intéressé à jouer ce que j’écoutais à ce moment-là : du grunge et du punk des années 90. Petit à petit, avec ce groupe, nous nous sommes mis à faire des choses un peu plus funky, puis du hip-hop avec des influences jazz. À côté de ça, mon professeur de guitare, Lachlan Coventry, qui faisait ses études au Conservatoire de Jazz de Canberra, m’a naturellement orienté vers ce genre musical. J’ai adoré ! J’ai ensuite fait mes études au même endroit, l’Australian National University School of Music.
Au départ j’ai découvert le jazz par une émission qui s’appelait Jazztrack, présenté par Mal Stanley sur la radio ABC, en Australie. Je devais avoir dix ans et j’étais assez intrigué par cette musique. Je me souviens que quand je l’écoutais je me disais : « Ah ! C’est ça le jazz, une musique où personne ne joue ensemble » ! J’ai appris à mieux la comprendre par la suite ! Notamment grâce à la belle collection de vinyles de mes parents.
Mes influences sont tellement nombreuses et variées qu’elles sont difficiles à toutes énumérer... Cela dit, si je m’en tiens aux guitaristes, je citerais d’abord Pat Metheny. Ensuite, j’ai découvert John Scofield et Bill Frisell. J’adore ce qu’ils font. Par ailleurs j’ai énormément d’influences au-delà du jazz : le rock, les musiques africaines, les musiques indiennes, la musique minimaliste etc.
Alex
Stuart © Christophe Brachet
Cinq clés pour le jazz
Avant tout, je dirais que les cinq caractéristiques nécessaires pour le jazz sont l’ouverture d’esprit, l’écoute, le dialogue, le groove, l’improvisation et la bienveillance.
Qu’est-ce que le jazz ? C’est dur à définir, mais la définition la plus importante pour moi est liée à l’improvisation. En fait ce n’est pas la définition qui est importante, l’essentiel c’est d’écouter et de jouer de la musique qui nous plaît. Les cultures musicales se croisent tellement aujourd’hui que c’est parfois difficile de les mettre dans des cases. D’ailleurs c’est peut-être même l'essence du jazz qui, au début, à New Orleans, n'était qu'un joyeux melting pot de cultures différentes...
Pourquoi la passion du jazz ? Pour cette liberté d’improviser, de créer sur l’instant, d'extérioriser et de canaliser ce qu’on ressent.
Où
écouter et découvrir le jazz ? Sur CD,
vinyle ou dans un club en live ! Entre le concert et
l’enregistrement, il y a deux façons différentes de modeler le
son, aussi géniale l’une que l’autre !
Une anecdote autour du jazz ? Le plus beau, et l’un de mes premiers concerts de jazz : j’ai seize ans et assiste à un concert qui se déroule au Tilleys, une salle de concert à Canberra, juste à côté de chez moi. C’est Billy Harper en sextet, avec le pianiste australien Barney Mcall : la chair de poule du début à la fin…
Le portrait chinois
Si j’étais un animal, je serais un kangourou,
Si j’étais une fleur, je serais un hellébore,
Si j’étais un fruit, je serais une mangue,
Si j’étais une boisson, je serais du vin,
Si j’étais un plat, je serais un phở,
Si j’étais une lettre, je serais le A,
Si j’étais un mot, je serais positif,
Si j’étais un chiffre, je serais 9,
Si j’étais une couleur, je serais bleu,
Si j’étais une note, je serais le Sol.
Les bonheurs et regrets musicaux
Mon dernier album Refuge est ma plus belle réussite musicale ! C’est un disque qui est encore plus rock, plus compact que mes précédents, donc pas forcément au goût des puristes du jazz, mais j’en suis fier. D'ailleurs peut être que certains ou certaines ne le définiront pas comme étant du jazz. Peu importe ! Les compositions me sont venues assez rapidement, avec un vrai côté instinctif. Les talentueux musiciens de l’album et moi leurs avons ensuite donné leurs couleurs avec un vrai son de groupe. Ce que je cherche souvent en musique c'est la transe et avec cet album je m'y retrouve...
Récemment j’ai trouvé beaucoup de plaisir à jouer de la basse, donc je regrette de ne pas l’avoir fait plus tôt ! J’adore jouer de cet instrument en groupe, son rôle musical et sa présence dans le son.
Sur
l’île déserte…
Quels
disques ? Grace de Jeff Buckley, A Go
Go de John Scofield, Funeral
d’Arcade Fire, Gone, Just Like a Train de
Bill Frisell, Worotan d’Oumou Sangare,
Vespertine de Björk et le troisième disque d’At
The Blue Note de Keith Jarrett.
Quels livres ? Breath de Tim Winton, The Road de Cormac McCarthy, House of Spirits d’Isabel Allende, What a Carve Up de Jonathan Coe et One Hunder Years of Solitude de Gabriel Garcia Marquez.
Quels films ? The Usual Suspects de Bryan Singer, The Adventures of Priscilla de Stephan Elliott, Queen of the Desert de Werner Herzog, Rabbit-Proof Fence de Phillip Noyce et Pulp Fiction de Quentin Tarantino.
Quelles peintures ? Toutes les œuvres bleues d'Yves Klein qui me transportent… Le travail d’Anselm Kiefer.
Quels loisirs ? Bodysurf, pêche, guitare et basse, lecture et passer du temps dans la nature...
Les projets
Faire vivre au maximum Refuge, avec une série de concerts en 2025 et 2026...
Trois vœux…
La paix dans le monde.
Un partage beaucoup plus
égalitaire des richesses au niveau mondial.
Une
humanité qui apprend à vivre en harmonie avec le monde naturel.














