Le 17 mai, La Dynamo
de Banlieues Bleues propose un double-concert avec un solo de ClaudeTchamitchian et le quartet de Joce Mienniel.
In Spirit
Tous les huit ans, Tchamitchian sort un album en solo ! En
1992, c’est Jeux d’enfants, le
premier disque en leader du contrebassiste. En 2010, Another Cmhildhood est publié ches émouvance, label que
Tchamitchian a créé en 1994. Quant à In
Spirit, il a été enregistré le 12 mars 2018 au Studio 106, pendant
l’émission A l’improviste, mais la date de sortie du disque n’est pas encore
annoncée...
Pendant le concert à La Dynamo, Tchamitchian joue trois des quatre
parties d’In Spirit. Le musicien
commence par expliquer la genèse du projet : il rappelle qu’il pratique le
solo depuis pas mal d’années, mais qu’à la différence de ses précédentes
expériences, cette fois, il a « entendu » la musique qu’il voulait
jouer à l’avance. Comme Tchamitchian constate que sa contrebasse ne lui permet
pas d’arriver à traduire ce qu’il a entendu, il décide d’en changer. Anne Jenny-Clark lui propose alors
l’une des deux contrebasses de Jean-François
Jenny-Clark, la deuxième étant jouée par Jean-Paul Céléa. In Spirit
reflète donc la musique qui lui est d’abord venu à l’esprit, mais c’est aussi un
hommage à la mémoire de Jenny-Clark.
Dans la première partie, Tchamitchian met à l’honneur le
gros son grave et boisé de la contrebasse avec un premier tableau minimaliste à
base d’ostinatos, puis de roulements qui s’accélèrent pour déboucher sur une
ligne rythmique rapide parsemée de slap. Le deuxième tableau, à l’archet,
évoque une sorte de « bruitisme industriel » : les ricochets de
l’archet sur les cordes produisent un vrombissement de machine dont l’intensité
croît et décroît. Une mélodie-riff sombre, suivie de contrechants rapides joués
en pizzicato constituent le dernier tableau. Pour la deuxième partie,
Tchamitchian fait appel à une technique de jeu plutôt inhabituelle avec deux
archets : un archet joue un bourdon, tandis que le deuxième déroule une
mélodie fragile aux accents moyen-orientaux, avec une sonorité qui rappelle un
peu une vièle. Tchamitchian joue également avec les dissonances et les
contrastes d’ambitus. Il conclut la deuxième partie avec un passage rapide,
construit sur des séries de contrepoints. La troisième partie commence par des
questions – réponses entre des notes cristallines aigues et une pédale grave, puis
s’envole sur une mélodie élégante portée par un ostinato groovy, joué en
contrepoint, un peu comme une basse continue.
Seul avec sa contrebasse, Tchamitchian arrive à créer des
mouvements d’une grande diversité et leur construction, particulièrement
cohérente, tient l’auditeur en haleine de bout en bout.
Tilt #2
En 2016, Mienniel monte le quartet Tilt avec Guillaume Magne à la guitare et au
banjo, Vincent Lafont au piano et
aux claviers et Sébastien Brun aux
percussions. Ils sortent leur premier opus éponyme chez Drugstore Malone, label
fondé par le flûtiste. Le concert de La Dynamo présente le deuxième opus de
Tilt, qui devrait voir le jour sous peu.
Au programme : quatre compositions signées Mienniel,
dont trois sans titre et « Appartement 643 », un hommage à Le Corbusier, puis des lectures libres
de la bande originale composée par Michael
Nyman pour Meurtre dans un
jardin anglais de Peter
Greenaway, « Gazzelloni » d’Eric
Dolphy (Out To Lunch! – 1964) et
« Money » des Pink Floyd (The
Dark Side of the Moon – 1973).
Tilt, c’est d’abord un son de groupe : une texture
sonore originale, avec un mélange de sophistication des timbres (notamment la
flûte, le banjo, la batterie « préparée » avec ses mailloches…), d’accords
électro aériens et de rythmique naturelle. Cette sonorité singulière est aussi
le fait de l‘absence de contrebasse et d’une utilisation fréquente des
techniques étendues – souffles, clés, voix, piano préparé… – et d’instruments
divers : harmonica, sanza, Korg MS20 et autres claviers... Le quartet met aussi
l’accent sur les ambiances : une marche funèbre qui tourne à la danse
irlandaise (« We Are Hoplessly Nothing… », le premier morceau), un
mouvement incantatoire dans une veine africaine (« World Wistle », le
deuxième morceau), une danse amérindienne qui se transforme en pièce baroque
(« Meurtre dans un jardin anglais »), un développement inspiré par Ennio Morriccone (« Appartement
643 » en hommage à Le Corbusier),
une polyrythmie qui passe à de la quasi-dance floor (« Gazzeloni »),
des superpositions de riffs heurtés (« Money »)… Tilt possède également
une personnalité romantique, avec un caractère parfois sombre (« We Are Hoplessly
Nothing… ») et emphatique (« Meurtre dans un jardin anglais »),
qui se manifeste clairement dans une chanson onirique (sans titre pour l’instant),
véritable pastiche des chants pop psychédéliques de l’époque des pattes d’eph
et autres chemises à fleurs...
Jazz, folk, classique, pop, world, électro, musique
répétitive… autant dire que Tilt puise son inspiration dans de multiples
sources pour proposer un cocktail détonnant !