26 février 2023

Chants sorciers au Café de la Danse

En 2019 Jean-Marie Machado monte L’amour sorcier avec l’orchestre Danzas et la compagnie de danse Chatha. Ce projet s’inspire du ballet-pantomime éponyme de Manuel De Falla, créé en 1915, sur un livret de Gregorio Martínez Sierra. Machado a enregistré une version discographique de cette œuvre, Cantos Brujos, qui sort le 24 février 2023 sur le label La Buissonne.

Jean-Marie Machado - Café de la danse - 9 février 2023 © PLM

Le 9 février 2023, Machado et Danzas présentent leur disque au Café de la Danse. L’orchestre est au grand complet avec, aux côtés de Machado, Karine Sérafin au chant, Stéphane Guillaume aux flûtes, Elodie Pasquier aux clarinettes, Jean-Charles Richard aux saxophones, François Thuillier au tuba, Cécile Grenier et Séverine Morfin à l’alto, Guillaumé Martigné au violoncelle, Didier Ithursarry à l’accordéon et Ze Luis Nascimento aux percussions.

Danzas - Café de la danse - 9 février 2023 © PLM

L’amour sorcier est l’histoire de Candela la gitane, qui cherche à éloigner le fantôme de son ancien amant pour pouvoir aimer à loisir Carmelo, son nouvel amour. La magie n’y faisant rien, elle demande à Lucia de séduire le fantôme… Le spectacle s’articule autour de cinq parties et vingt mouvements. Onze morceaux sont signés de De Falla et neuf de Machado. Si Machado a conservé les mélodies de De Falla et la trame générale du ballet, il l'a, en revanche, entièrement réarrangé pour y ajouter sa touche personnelle.

Les airs sont un savant mélange d’élégance, de majesté mystérieuse et de tension dramatique. Si l’ombre du flamenco plane au-dessus de l’œuvre, et c’est particulièrement sensible dans les chants, les compositions de De Falla – et de Machado – sont avant tout modernes, dans l’esprit de Claude Debussy, Maurice Ravel, Igor Stravinsky… Les Cantos Brujos sont descriptifs (le bâton de palabre pour les flammes ou les effets en technique étendue) et expressifs (la voix imposante, les traits arabo-andaloux et moyen-orientaux, les envolées free…). 

La construction des morceaux et leur traitement rythmique renforcent le caractère pittoresque de la musique. Côté construction, plusieurs plans se superposent, s’entrelacent ou s’unissent. L’instrument soliste, le chœur des cordes, la section des soufflants et la rythmique déploient une palette d’ostinatos, de pédales, de riffs et de bourdons, qui soutiennent des unissons lointains, des vocalises aériennes, des contre-chants luxuriants, des chassés-croisés brillants, des mouvements rubato et des pizzicato entraînants. Les solistes virevoltent, comme dans un concerto, dans des ambiances qui vont de la mélancolie à la guinguette. Sur le plan rythmique, les percussions foisonnent, frémissent, crépitent et exploitent toutes les sonorités des peaux et métaux, tantôt puissantes et touffues, tantôt légères et musicales, mais toujours entraînantes ; les lignes graves du tuba maintiennent une carrure solide ; le piano jongle avec les interventions rythmiques et les développements mélodiques ; quant à l’orchestre, son énergie et sa densité de jeu contribuent grandement au caractère théâtral de Cantos Brujos.


Sur les traces de Duke Ellington, André Hodeir ou du Third Stream, Machado rapproche le jazz de la musique classique. Avec son orchestre Danzas, il réussit à produire une œuvre intense : les Cantos Brujos sont envoûtants du rêve de Candela au lever du soleil...

Le disque

Cantos Brujos
Jean-Marie Machado & Danzas
Karine Sérafin (voc), Stéphane Guillaume (fl), Elodie Pasquier (cl), Jean-Charles Richard (sax), François Thuillier (tu), Cécile Grenier (alto), Séverine Morfin (alto), Guillaumé Martigné (cello), Didier Ithursarry (acc), Jean-Marie Machado (p) et Ze Luis Nascimento (perc).
La Buissonne – RJAL397045
Sortie le 24 février 2023

Liste des morceaux

Escena uno
01. « Sueño de Candela », Machado (2:30).
02. « Canción del amor dolido », De Falla (5:55).
03. « La luna y el misterio », Machado (2:23).
04. « En la cueva. La noche », De Falla (1:50).
05. « Danza del terror », De Falla (3:18).

Escena dos
06. « El relato desl círculo », Machado (1:23).
07. « El círculo mágico », De Falla (1:53).
08. « Magic Love », Machado (3:07).
09. « Como llamas », Machado (1:45).
10. « Danza ritual del fuego », De Falla (3:57).

Escena tres
11. « Ame Slo! », Machado (1:45).
12. « Escena-allegro », De Falla (1:55).
13. « Arena y viento », Machado (2:17).
14. « Canción del fuego fatuo », De Falla (4:14).

Escena cuatro
15. « Chispas brujas », Machado (4:11).
16. « Pantomima – Andantino tranquilo », De Falla (3:13).
17. « Pantomima – Molto tranquillo », De Falla (2:44).

Escena cinco
18. « Danza y canción del juego del amor », De Falla (5:33).
19. « Por la mañana », Machado (2:37).
20. « Final – Las campanas del amanecer », De Falla (3:53).

19 février 2023

Gauthier Toux Trio au New Morning

En 2013, Gauthier Toux monte un trio avec Kenneth Dahl Knudsen à la contrebasse et Maxence Sibille à la batterie. Le trio publie More Than Ever en 2015, Unexpected Things en 2016 et The Coulours You See en 2018. Pour The Biggest Steps, sorti en février 2022, Simon Tailleu remplace Dahl Knudsen. C’est avec cette formation et Emile Parisien en invité, que Toux célèbre la réédition du disque en vinyle, le 8 février 2023 au New Morning. Malgré les grèves, le match PSG – OM et le froid, le club de la rue des Petites Ecuries affiche complet.

Le trio joue neuf des onze morceaux de The Biggest Steps, tous signés Toux, à l’exception de « Jenny Wren », chanson de Paul McCartney. Le quartet reprend également « It All Depends On The Light », tiré de l’album The Colours You See et clin d’œil au daltonisme du pianiste. En rappel, Toux présente « Why Should We Care? » (s’il s’agit de jazz ou pas...) qui figurera sur le prochain disque du trio. Parisien se joint au trio sur cinq morceaux.

Gauthier Toux Trio © PLM

« A Secret Place » plante le décor : pédales, discours minimalistes, technique étendue, cymbales emphatiques… et montée en tension progressive, avec une maîtrise du suspens dans la lignée d’E.S.T. Les influences pop – rock sont encore plus flagrantes dans « There Is No Shortcut », avec le démarrage abrupt, le thème-riff et la section rythmique puissante. « Turning Around » reprend une progression similaire : sur un martèlement binaire, une carrure robuste et un piano incandescent, le saxophone soprano déroule des phrases d’une intensité croissante. « Driving Away » s’appuie sur les contrastes entre les frappes dansantes de la batterie, comme pour un slow, les lignes mélodieuses de la contrebasse, les motifs hypnotiques du piano et la complainte du soprano. Toux et Parisien s’emparent de « It All Depends On The Light » à grand renfort de questions-réponses ébouriffantes, pendant que Tailleu et Sibille font gronder leurs instruments, jusqu’au solo musclé de Sibille. Les coups mats et binaires de la batterie, les pédales de la contrebasse, les cellules répétitives du piano et la gestion de la tension place « Hanging On It » sous le signe de The Bad Plus. Parisien est de retour pour « Roads » : un bourdon à l’archet suivi d’un riff entraînant, des cliquetis percussifs puis des martèlements et des boucles évolutives servent d’écrin aux arabesques du soprano, qui tient en haleine les auditeurs. La chanson sans parole, « Twelve », se transforme en duo intimiste entre le soprano et le piano. « The Biggest Steps » flirte avec la pop-rock, poussée par une batterie toute en force, des riffs vrombissants et une mélodie qui tient du rock progressif. Après un démarrage dans une veine contemporaine plutôt mystérieuse, le trio fait décoller « Jenny Wren » avec des ostinatos entêtants, des pédales capiteuses, des envolées free cristallines et un foisonnement rythmique tendu. Le soprano revient sur scène pour le rappel. Jolie mélodie exposée par le soprano et le piano en contrepoint, sur une rythmique vigoureuse, « Why Should We Care? » prend peu à peu la direction d’un tube de dancefloor électro, avec des boucles rythmiques rapides et binaires, jouées ensemble par le quartet. Le public se prend au jeu et l’intensité est palpable. Après l’accélération coutumière, le quartet finit sur un chuinté et quelques notes de « Go Down Moses », citées avec humour par Parisien…

Plus d’une heure quarante d’une musique fiévreuse et athlétique : le Gauthier Toux Trio n’a pas volé son qualificatif de Power Trio !


18 février 2023

Quand quatre musiciens et deux trios sortent de l’igloo...

En 1984, trois musiciens liégeois montent le « plus petit big band du monde » autour d’une instrumentation originale : Fabrizio Cassol au saxophone alto, Michel Massot au tuba et au trombone, et Michel Debrulle à la batterie. Pendant ses huit années d’activité, le Trio Bravo publie quatre albums : Pas de nain (1985), Hi-O-Ba (1987), Compact (1988) et Quatrième monde (1990). Après la dissolution du Trio Bravo, en 1992, Massot et Debrulle ne veulent pas en rester là et s’associent au poly-instrumentiste Laurent Dehors pour former le Trio Grande. Après un premier disque éponyme en 1994, les trois artistes sortent Signé (20« Pas de nain »), Official Bootleg: Live at SOhO (2007), Un matin plein de promesses (avec Matthew Bourne au piano – 2008), Hold The line! (toujours avec Bourne – 2011) et Trois Mousquetaires (2016). Pour fêter ses trente ans, le Trio Grande publie Impertinence chez Igloo Records, le 7 octobre 2022. La maison de disques belge, qui aura quarante-cinq ans en 2023, célèbre l’anniversaire du Trio Grande avec une réédition au format CD des deux premiers disques du Trio Bravo, uniquement sortis en vinyles à l’époque.


Impertinence

Au programme d’Impertinence, sept morceaux de Massot et quatre de Dehors, plus la composition-titre signée Debrulle et Massot, et le menuet de la troisième suite française de Jean Sébastien Bach, « transfiguré » par Massot.

Le Trio Grande propose un large éventail thématique : des thèmes-riffs heurtés (« Impertinence »), aux accents funky (« Heureux »), des mélodies d’une mélancolie joyeuse (« Jamais deux sans trois »), des farandoles nouvelle-orléanaises (« Mimi »), mais aussi des comptines (« Pour les petits ») qui rappellent un peu Raashan Roland Kirk, des airs aériens cinématographiques (« Mathilde ») ou graves comme dans un conte de Segueï Prokofiev (« Murmures »), et même une ritournelle folklorique bretonne (« Taiko Blues »). A l’instar des fanfares, le Trio Grande fait la part belle aux rythmes. Les lignes de basse grondent (« Impertinence »), parfois minimalistes (« Charleston »), mais toujours entraînantes (« Mimi »). Les percussions foisonnent (« Escalles ») dans un feu d’artifice polyrythmique (« Rue de la brasserie »), saccadé (« Jamais deux sans trois »), dynamique (« Heureux »), dansant (« Taiko Blues ») et d’une musicalité réjouissante (« Murmures »). L’une des forces du Trio Grande est aussi d’arriver à faire cohabiter tradition populaire et développements savants, à l’image des envolées free (« Rue de la brasserie »), des jeux en technique étendue (« Impertinence »), des contre-chants élégants entre le trombone et la clarinette basse (« Mathilde »), des questions-réponses délirantes (« Taiko Blues »), ou de la basse continue et des contrepoints baroques du « Menuet transfiguré ». Le Trio Grande utilise habilement la palette des instruments à sa disposition pour jouer avec les couleurs sonores, comme un grand orchestre…

Un peu comme dans une Rubrique-à-brac, la musique du Trio Grande et fourmille d’idées improbables, que les trois musiciens manient avec une dextérité admirable. Souhaitons que le Trio Lobo n’arrive pas trop rapidement !

Le disque

Impertinence
Trio Grande
Laurent Dehors (sax, cl, cornemuse, guimbarde, hca), Michel Massot (euphonium, sousaphone, tb) et Michel Debrulle (d, perc).
Igloo Records – IGL336
Sortie le 7 octobre 2022

Liste des morceaux

01. « Pour les petits », Massot (2:23).
02. « Jamais deux sans trois », Massot (4:04).
03. « Impertinence », Debrulle & Massot (7:21).
04. « Escalles », Massot (5:04).
05. « Mimi », Dehors (4:51).
06. « Heureux », Dehors (3:39).
07. « Menuet Transfiguré », Bach & Massot (4:25).
08. « Murmures », Massot (3:30).
09. « Charleston », Dehors (3:13).
10. « Mathilde », Massot (4:35).
11. « Rue de la Brasserie », Massot (4:18).
12. « Taiko Blues », Dehors (5:55).


Pas de nain & Hi-O-BA

Pour cette réédition, Igloo a rassemblé deux vinyles sur un CD, soit quinze morceaux et près d’une heure vingt de musique… Cassol signe cinq morceaux, dont « Blythologie » en hommage au saxophoniste alto Arthur Blythe, Massot propose deux titres, quant à « Lou et c’est… max ! », c’est une composition collective. Le trio reprend également deux thèmes du saxophoniste soprano Pierre Vaiana, deux du pianiste-claviériste Henri Pousseur, « X Mus », un air traditionnel turc, « Out There Straight Up And Down » d’Eric Dolphy et « Lonely Woman » d’Ornette Coleman.

Comme pour le Trio Bravo, instrumentation oblige, les mélodies de Trio Grande sont le plus souvent des thèmes-riffs dans un style fanfare (« Rue américaine »), tonitruants (« Blythologie »), entraînants (« X Mus ») et, parfois, teintés de rock (« Hi-O-BA (The Will of Moderation) »). Le blues (« Dédé d’Anvers »), le cirque (« Osdorf »), le cinéma (« Out There Straight Up and Down »), le rock progressif (« Fulton Street Station ») et la musique contemporaine (« Mr And Mrs Jonathan ») s’invitent également dans cette joyeuse ambiance foutraque. Le trio ne manque d’ailleurs pas d’humour, à l’image de « Pas de nain », espèce d’orphéon bouffon, ou de « Hi-O-BA (The Will of Moderation) » et son « Moderation, Mo, Mo... », caricature « bowiesque »… Côté rythmique, encore une fois, à l’instar de leurs
successeurs, le Trio Bravo mise sur l’énergie (« Out There Straight Up and Down »), la puissance (« Vertige ») et une poly-rythmique luxuriante (« Red Monk »). Du binaire mat et sec (« Rue américaine ») côtoie une ligne en walking et son chabada (« Blythologie »), un passage swing (« Out There Straight Up and Down »), des moments funky (« Minoque »), voire Rhythm and Blues (« Rue américaine »). Trio Bravo est sans doute plus brutal (« Lou et c’est… max ! ») et rock (« Minoque ») que Trio Grande, même s’il est capable d’élégance et de délicatesse (« Lonely Woman »). Le plus petit big band du monde est particulièrement expressif dans un style animalier, avec des barrissements, rugissements et autres grondements (« Out There Straight Up and Down »), ronflements, piailleries et feulements (« Minoque »), ou bruitages jungle (« Fulton Street Station »), mais aussi dans des ambiances délirantes, au parfum dada, avec des vocalises, rires, phrases… qui se mêlent aux notes (« Vertige »).

Véritable fanfare free rock, le Trio Bravo présente une musique résolument théâtrale… pour le plus grand plaisir de nos esgourdes !

Les disques

Pas de nain
Trio Bravo
Fabrizio Cassol (as, voc), Michel Massot (tu, tb, voc) et Michel Debrulle (d, voc).
Igloo Records – IGL030
Sortie le 1er novembre 1985

Liste des morceaux

01. « Blythologie », Cassol (2:53).
02. « Pas de nain », Vaiana (4:44).
03. « Dédé d’Anvers », Vaiana (5:29).
04. « Osdorf », Pousseur (1:24).
05. « X Mus », traditionnel turc (2:28).
06. « Out There Straight Up and Down », Dolphy (6:43).
07. « Mr And Mrs Jonathan », Pousseur (5:52).
08. « Red Monk », Cassol (5:36).

Hi-O-BA

Trio Bravo
Fabrizio Cassol (as, voc), Michel Massot (tu, tb, voc) et Michel Debrulle (d, voc).
Igloo Records – IGL052
Sortie le 1er mars 1987

Liste des morceaux

01. « Fulton Street Station », Cassol (3:18).
02. « Minoque », Massot (8:44).
03. « Lou et c’est… max ! », Massot, Cassol & Debrulle (4:11).
04. « Hi-O-BA (The Will of Moderation) », Cassol (4:11).
05. « Rue américaine », Cassol (8:17).
06. « Lonely Woman », Coleman (4:56).
07. « Vertige », Massot (2:33).



04 février 2023

A petits pas – Duo Continuum

Voilà plus de vingt ans qu’Yves Rousseau et Jean-Marc Larché croisent leurs sons dans moult projets. Il n’est donc pas surprenant que leurs aventures musicales passent par un duo qui, en toute logique, s’appelle le Duo Continuum…

Après avoir rodé leur répertoire pendant près de six ans, le 18 novembre 2022, les deux artistes sortent A petits pas sur le label MCO. Les quinze pièces durent en moyenne trois minutes trente et sont signées Larché ou Rousseau. La « Pavane » est inspirée d’un air du XVIIe composé par Alfonso Ferrabosco, « Wie soll ich Dich empfangen » est tiré du choral numéro 5 de l’Oratorio de Noël de Johann Sebastian Bach, tout comme l’« Aria », repris des Variations Goldberg. La plupart des morceaux sont des hommages : « Ambre », dédié à Ambre Blaszczynski, adolescente décédée en 2012 ; « L’envol », à la mémoire des deux frères de Rousseau ; « Hundertwasser » évoque l’architecte et peintre autrichien Friedensreich Hundertwasser ; « Don Juan aux enfers » est évidemment lié à Charles Baudelaire ; « Solitude », en souvenir de la chorégraphe Mié Coquempot, disparue prématurément en 2019 ; « La Vie du Milieu » est une ode au Juras ; « Miró » est, bien entendu, un tribut au peintre éponyme, mais aussi une dédicace au contrebassiste Miroslav Vitouš ; « Stances galantes » et « Petits pas » sont des clins d’yeux à Molière ; quant à « Uyuni », c’est une allusion au désert de sel des hauts plateaux boliviens…

A petits pas est placé sous le signe de la musique baroque, pas uniquement pour Bach, Ferrabosco ou Molière, ni pour la reprise littérale de l’« Aria » des Variations Goldberg, mais aussi pour les contrepoints magnifiques (« Don Juan aux Enfers »), les bourdons majestueux (« Wie soll ich Dich empfangen ? »), la structure thème – variations (« Stances galantes » et « Petits pas »), les développements horizontaux (« L’envol »), les airs de danse (« Pavane »)... Aux couleurs baroques s’ajoutent également des touches moyen-orientales (« Interlude »), des zestes de tango (« Stances galantes »), des accents impressionnistes (« La Vie du Milieu »), des nuances figuratives (« Solitude »), des tournures mélancoliques (« Ambre ») ou des teintes éthérées (« Miró »). Des subtilités harmoniques et lignes délicates d’« Ambre » aux motifs profonds et phrases aériennes de « Uyuni », en passant par les unissons mystérieux et questions-réponses sombres et débridées des « Ouches », les riffs entraînants et chorus tendus de « Hundertwasser », la walking ample et les volutes vaporeuses de « Wie soll ich Dich empfangen ? », les contre-chants élégants de « L’envol », le déroulé de l’« Aria » que le Cantor de Leipzig aurait applaudi : les dialogues de Larché et Rousseau sont passionnants de bout en bout.

A petits pas est un disque émouvant. C’est tout, mais c’est déjà beaucoup !

Le disque

A petits pas
Duo Continuum
Jean-Marc Larché (ss) et Yves Rousseau (b).
Label MCO - MCO16
Sortie le 18 novembre 2022

Liste des morceaux

01. « Ambre », Jean-Marc Larché (2:15).
02. « L’Envol », Yves Rousseau (4:43).
03. « Pavane », Jean-Marc Larché, d’après Ferrabosco (4:32).
04. « Les Ouches », Jean-Marc Larché (3:20).
05. « Hundertwasser », Yves Rousseau (5:04).
06. « Wie soll ich Dich empfangen ? », d’après Bach (3:43).
07. « Interlude », Jean-Marc Larché (2:28).
08. « Aria », d’après les Variation Goldberg de Bach, Variations Goldberg (3:07).
09. « Don Juan aux enfers », Yves Rousseau (2:34).
10. « Solitude », Yves Rousseau (2:29).
11. « La Vie du Milieu », Jean-Marc Larché (4:26).
12. « Miró », Yves Rousseau (3:19).
13. « Stances galantes », Yves Rousseau (2:34).
14. « A petits pas », Yves Rousseau (3:44).
15. « Uyuni », Yves Rousseau (2:06).