Si l’on excepte une formation afro-américaine, mais pas vraiment jazz (Negerkapellet), venue en Norvège en 1898, l’histoire du jazz en Norvège remonte aux années vingt, avec, en 1921, le premier concert de jazz à proprement parler (Bodø Jazz Band) et, à partir de 1923, les premières formations locales, dont le Sixpence Jazzband, Freddie Valiers String Swing, Robert Normann... 1938 est l’année du premier disque de jazz norvégien, enregistré par les Funny Boys. La seconde guerre mondiale met un coup d’arrêt au développement du jazz en Norvège. Il faut attendre le début des années cinquante pour que la scène du jazz retrouve sa vitalité avec, notamment, le Big Chief Jazz Band et l’orchestre du pianiste Kjell Karlsen. A partir des années soixante, mais surtout soixante-dix, le jazz norvégien gagne ses lettres de noblesse grâce au saxophoniste Jan Garbarek, à la chanteuse Karin Krog, au batteur Jon Christensen, au guitariste Terje Rypdal, au contrebassiste Arild Andersen…
En 1980, le Conservatoire de Musique de Trondheim ouvre une classe de jazz qui va former la plupart des musiciens de jazz contemporains. Aujourd’hui, les musiciens de jazz norvégiens écument clubs et festivals, à l’instar de Bugge Wesseltoft, Nils Petter Molvaer, Christian Wallumrod, Tord Gustavsen, Mathias Eick, Eivind Aarset, Jacob Young… sans oublier des formations telles que Jaga Jazzist, Wibutee, Atomic...
Créé en 1953, le
Norsk Jazzforum a pour vocation de soutenir et faire connaître le jazz norvégien. L’institution est non seulement présente à Oslo, mais aussi dans cinq régions, et soutient une vingtaine de festivals, autour de soixante-quinze clubs de jazz, quelques cent vingt orchestres, près de six cent musiciens professionnels et plus de cent trente étudiants… Le Norsk Jazzforum a également créé le Victoria Nasjonal Jazzscene en 2006, un club de trois cent places, à Olso. Depuis 2012, le Norsk Jazzforum publie chaque année une compilation qui dresse un état des lieux du jazz norvégien. En 2022, le double-disque sort le 28 avril, avec trente morceaux extraits d’albums enregistrés entre 2020 et 2022.
Piano – Kjetil Mulelid
Kjetil Mulelid a imaginé le répertoire de
Piano (
Rune Grammofon – 2021)
pendant le confinement. Cet album solo a été enregistré sur un Bösendorfer de 1919, à quelques cent vingt kilomètres d’Oslo, dans le mythique studio Athletic Sound, fondé à Halden en 1983 par
Kai Andersen. Comme le souligne Mulelid, il est « constamment à la recherche d’une belle mélodie, d’un rythme fascinant ou d’un son intéressant ». Avec ses ligne mélodiques élégantes, au parfum romantique et aux développements sophistiqués, « Beginning » en est la confirmation !
Human Samling – Harald Lassen
Harald Lassen sort
Human Samling en 2020 chez
Jazzland Recordings avec son quintet, constitué de
Sander Eriksen Nordhal aux guitares,
Bram De Looze au synthétiseur et piano,
Stian Andersen à la contrebasse et
Tore Flatjord à la batterie. Le saxophoniste veut que ses albums raconte une histoire. « How It Feels Pt. 2 » juxtapose plusieurs tableaux : d’abord baroque, avec des contrepoints amusants, ensuite un piano cristallin, plutôt contemporain, sur une rythmique douce et des effets d’arrière-plan, puis une tournerie dansante du ténor, accompagnée de poly-rythmes et du piano en contre-chant… Un foisonnement sonore vivant et très cinégénique !
Asura – Marthe Lea Band
Marthe Lea a monté son quintet en 2018 avec
Hans P. Kjorstad au violon,
Andreas Røysum à la clarinette,
Egil Kalman à la contrebasse et
Hans Hulbœkmo à la batterie. « Sakina » fait partie de
Asura, sorti en 2021 chez
Motvind Records. Un unisson abrupt expose un thème-riff ardent sur une batterie dense et un motif de contrebasse entraînant. Le développement s’articule autour de lignes dynamiques superposées, qui évoquent une fanfare free, puis une transe, basée sur des boucles vocales incantatoires. Marthe Lea Band s’amuse et fait danser les notes dans une ambiance jubilatoire.
Being – Eyolf Dale
Dans la lignée des trios piano – contrebasse – batterie,
Eyolf Dale convoque
Per Zanussi et
Audun Kleive pour
Being, enregistré au Oslo Concert Hall et publié en 2021 chez
Edition Records. « Northern Brewer » s’appuie sur une section rythmique vive, légère et entraînante, avec les lignes mélodieuses de la contrebasse et les frappes serrées de la batterie. Le piano alterne énergie et délicatesse. La main gauche se joint aux motifs entraînants de ses deux compères, pendant que la main droite déroule des phrases fluides. Un morceau néo-bop malin.
Ambush – A Tonic For The Troops
A Tonic For The Troops est un quartet animé par la contrebassiste
Ellen Brekken. Le saxophoniste
Magnus Bakken, le pianiste
Espen Berg et le batteur
Magnus Sefaniassen Eide complètent le combo. « The Capitulation of Alexandria » ouvre
Ambush, édité en 2021 chez
Odin Records. Des poly-rythmes dansants, des riffs puissants du piano, des accents moyen-orientaux, des lignes de basse sourdes et carrées et des mélodies lointaines du soprano, parsemées de modulations, pour un morceau qui s’emballe dans une course effrénée... Un jazz moderne énervé !
The Earth is # – Friends & Neighbors
Friends & Neighbors est un quintet norvégien-suédois.
André Roligheten (saxophones, clarinettes et flûte),
Thomas Johansson (trompette),
Oscar Grŏnberg (piano),
Jon Rune Strøm (contrebasse) et
Tollef Østvang (batterie) se sont rencontrés à Trondheim en 2008.
The Earth Is #, leur cinquième disque, sort en 2021 chez
Clean Feed Records. Après un démarrage dans un esprit hard-bop, avec des questions-réponses entre le piano et le reste de l’orchestre à l’unisson, « Untitled » démarre sur un chorus du piano, au swing solide, porté par une walking et un chabada. Quand les soufflants entrent dans la danse, le morceau vire free, avec des solos tendus et le soutien d’un riff puissant de la contrebasse et d’une batterie touffue. Le quintet mélange les genres – bop et free – et les musiciens jouent au chat et à la souris...
Bricoleur – Jakop Janssønn
Le percussionniste
Jakop Janssønn a réuni le tubiste
Daniel Herskedal, le violoniste Håkon Aase et l’orchestre Arktisk Filharmoni pour
Bricoleur, album sorti en 2020 chez Finito Bacalao Records.
Bricoleur est marqué par la musique Sami, culture dont est issue Janssønn. « Jámežiid heajat » en donne un bon exemple : percussions omniprésentes, complexes et en interaction constante avec le tuba et le violon, thème majestueux au tuba, nappes de cordes discrètes, riff et mélodie aux allures jazz-folk, accentuée par le jeu du violon… Un morceau vivant dans un univers tout à fait personnel.
House On A Hill – Terje Gewelt
House on A Hill – évocation du confinement –, sorti en 2020 chez
Resonant Music, est le treizième disque de
Terje Gewelt. Pour l’occasion le contrebassiste est entouré de
Bjørn Klakegg à la guitare,
Erlend Slettevoll au piano et claviers, et
Terje Evensen à la batterie. Les cliquetis de la batterie et le motif sur deux notes de la contrebasse impriment un rythme dansant, sur lequel la guitare joue « House on A Hill », un air mélodieux, repris dans un chorus musical de la contrebasse. Le morceau s’inscrit dans une veine jazz aux accents pop rock.
Velkommen håp - Flukten
Flukten est né en 2020 : un an après, le quartet sort
Velkommen håp chez
Odin Records. Flukten, c’est
Hanna Paulsberg au saxophone ténor,
Marius Hirth Klovning à la guitare,
Bárŏur Reinert Poulsen à la contrebasse et
Hans Hulbœkmo à la batterie. Au titre des influences, le quartet cite pêle-mêle
John Coltrane,
Bill Frisell,
Carla Bley,
Annette Peacock,
Paul Bley… Le ton est donné ! Le morceau éponyme, « Velkommen håp », fait des va-et-vient autour d’un thème-riff. Une batterie brutale, une contrebasse supersonique, une guitare et un ténor furibonds, qui poussent des cris à la
Albert Ayler et se livrent des joutes sonores déchaînées… Flukten navigue dans les eaux free noise.
Dust Breathing – Møster!
Møster! est un quartet formé par le saxophoniste et multi-instrumentiste
Kjetil Møster avec
Hans Magnus Ryan à la guitare,
Nikolai Haengsle à la basse et
Kenneth Kapstad à la batterie. « The Bonfire, The Sun » est tiré de
Dust Breathing, sorti en 2020 chez
Hubro. Ostinatos de la guitare, et rythmique régulière et entraînante, avec des couleurs folk, servent d’écrin à la clarinette basse qui décline un thème élégant. Le groupe monte en puissance, porté par des effets lointains, une rythmique hypnotique et les phrases électrifiées du saxophone. La musique de Møster! est puissante, marquée par le folk et l’électro.
Gold – Elin Rosseland and Johannes Eick
Elin Rosseland et
Johannes Eick jouent ensemble depuis près de quarante ans… « Silence Wind and Water », extrait de l’album
Gold, sorti en 2020 chez
Curling Legs, a été conçu comme « un cadre pour improviser ». La voix claire, le timbre soyeux et le phrasé distinct de Rosseland se marient aux lignes élégantes et déliées de la contrebasse. L’improvisation en duo, avec les vocalises qui dialoguent avec la contrebasse, est particulièrement élégante.
Subaqueous Silence – Ayumi Tanaka Trio
Débarquée du Japon il y a une dizaine d’année, la pianiste
Ayumi Tanaka s’est entourée de
Christian Meaas Svendsen à la contrebasse et
Per Oddvar Johansen à la batterie. Après un premier disque,
Memento, le trio publie
Subaqueous Silence chez
ECM en 2021. Fidèle à la ligne éditorial du label munichois, « Ruins II » confirme que le moins n’est pas l’ennemi du mieux. Le minimalisme est de rigueur : une ligne de piano clairsemée qui suggère la mélodie, une contrebasse qui évolue en contre-chant et une batterie toute en retenue, le tout parsemé de silences… « Ruins II » est ultra-méditatif.
Ungdomskilden – Wendra Hill
Le duo
Wendra Hill –
Jo David Meyer Lysne au synthétiseur et
Joel Ring à la basse – invite le batteur
Øyvind Hegg-Lunde pour
Ungdomskilden, sorti en 2021 chez
Playdate Records. « Slanger Og Nattergaler » démarre sur une voix off. La suite est un collage d’effets électro, bruitages lointains, vagues de sons, jeux de percussions et motifs courts du piano. La musique de Wendra Hill est un véritable paysage sonore...
Nature Hath Painted The Body – Jonas Cambien trio
Jonas Cambien est né en Belgique, mais installé à Oslo. Le pianiste a enregistré
Nature Hath Painted The Body en 2021 pour
Clean Feed Records en compagnie d’
André Roligheten aux saxophones soprano et ténor, et d’
Andreas Wildhagen à la batterie. « Mantis » est conçu autour d’une tournerie aux couleurs des Balkans, qui évolue en boucle dans l’esprit de la musique répétitive, sur une rythmique hypnotique et les saillies débridées du ténor. Un free folk captivant.
Unheimlich Manoeuvre - Jo Berger Myhre
Unheimlich Manoeuvre sort en 2021 chez
RareNoiseRecords. Le bassiste et multi-instrumentiste
Jo Berger Myrhe y joue en quartet, avec
Jo David Meyer Lysne à la guitare,
Jana Anisimova au piano et
Morten Qvenild au synthétiseur.
Unheimlich Manoeuvre combine improvisation et montage post production. « Aviary » est exposé à l’unisson par le piano et le synthé, soutenus par une pédale de la basse, accompagnée de claquements électriques. Le thème, entre romantisme et Lounge, est ensuite répété et souligné par des effets électro abondants. « Aviary » pourrait s’apparenter à de l’Ambient.
The Land In-Between – Shannon Mowday & Lila
In 2019, la clarinettiste contre-alto
Shannon Mowday forme un quartet avec
Helge Lien au piano,
Johannes Eick à la contrebasse (à six cordes) et
Erik Nylander à la batterie.
The Land In-Between, hommage à
Courtney Pieters, est sorti en 2020 chez
OKWorld Records. « Supposing », composé d’après le poème éponyme d’
Alan Alexander Milne, repose sur des jeux rythmiques dansants, des questions – réponses élégantes entre le piano et la clarinette, des chorus intenses, des séries de contrepoints… Le quatuor a une belle sonorité naturelle, les interactions sont piquantes et l’ensemble évoque un jazz de chambre.
(Exit) Knarr – Ingebrigt Håker Flaten
Ingebrigt Håker Flaten est le contrebassiste fondateur des groupes Atomic et The Thing. Mais pour
(Exit) Knarr (
Odin Records – 2021), il a monté un octet avec
Mette Rasmussen au saxophone alto,
Atle Nymo au saxophone ténor et aux clarinettes,
Eivind Lønning à la trompette,
Oddrun Liljaj Onsdottir à la voix et à la guitare,
Oscar Grönberg au piano et aux claviers,
Veslemøy Narvesen et
Olaf Olsen à la batterie et aux percussions. « Miles Ave – For Austin » n’est lié ni à
Miles Davis, ni à une demoiselle Austin, mais au nom d’une rue de la ville texane où le contrebassiste « s’est marié et a divorcé » ! Frappes de mains, cliquetis, coups épars... lancent le morceau. Sur des percussions rapides et régulières, et des riffs profonds et groovy de la contrebasse, le piano reste minimaliste, tandis que les soufflants lâchent des stridences, jets de sons, bruitages et autres cris. Ce foisonnement monte en puissance pour déboucher sur un thème-riff claironnant, joué à l’unisson, puis, dans un décor de sons luxuriants et une rythmique entêtante, le chorus de la trompette s’aventure dans un terrain free… La fanfare d’IHF est clairement expressionniste !
Fredsfanatisme – Andreas Røysum Ensemble
En 2019, le clarinettiste
Andreas Røysum crée son ensemble avec huit amis musiciens :
Henriette Eilertsen à la flûte,
Signe Emmeluth au saxophone alto,
Marthe Lea au saxophone ténor,
Hans P. Kjorstad au violon,
Joel Ring au violoncelle,
John Andrew Wilhite et
Christian Meaas Svendsen à la contrebasse, et
Andreas Wildhagen et
Ivar Myrset Asheim à la batterie. Après un premier album éponyme sorti en 2020, le nonette récidive avec
Fredsfanatisme, sorti en 2021 chez
Motvind Records. Dans « Hina, Hina », la rythmique est véloce, nerveuse et incantatoire, le thème est un riff joyeux avec des accents de musique du monde, voire folk quand la flûte et le violon s’en mêlent, la pâte sonore est dense et colorée, et les développements s’appuient sur une superposition de lignes et des échanges croisés dans tous les sens… Voilà une fanfare fébrile et radieuse !
Hymn For My Brother – Olga Konkova Trio
Olga Konkova a enregistré
Hymn For My Brother avec son trio, constitué de
Per Mathisen à la contrebasse et
Gary Husband à la batterie. Le disque est sorti en 2021 chez
Losen Recrords. « Open Secret » part d’une mélodie mélancolique au piano, soulignée par la contrebasse, sobre et profonde, et la batterie, légère aux balais. Le développement reste dans une veine solennelle qui sied parfaitement au message intime que fait passer le trio.
Voice & Strings & Timpani – Strings & Timpani
Le guitariste et bassiste
Stephan Meidell et le batteur
Øyvind Hegg-Lunde ont monté le duo Strings & Timpani il y a une vingtaine d’années. En 2016, à l’occasion du Nattjazz Festival de Bergen, ils élargissent leur horizon avec
Mari Kvien Brunvoll et
Eva Pfitzenmaier aux voix,
Stein Urheim aux guitares et
Kim Åge Furuhaug à la batterie. Tous les musiciens manipulent également des synthétiseurs et autres machines électroniques. Le disque
Voice & Strings & Timpani sort en 2020 sur le label
Hubro. « Cashmere », qui a été interprété lors du festival à Bergen, met en scène des effets électro et nappes sonores lointaines, crépitements sourds, ostinatos cristallins, boucles minimalistes… dans une ambiance éthérée. La rythmique binaire, les vocalises rythmiques, les guitares aériennes, avec des phrases modulées comme un sitar… tout évoque une atmosphère électro smooth méditative.
Plastic Wave – Trondheim Jazz Orchestra & Ole Morten Vågan
Depuis le début des années 2000, le
Trondheim Jazz Orchestra, communément appelé TJO, est l’une des formations phares norvégiennes. Dans sa discographie, forte de plus de vingt cinq titres, le TJO a toujours des invités :
Chick Corea,
Marius Neset,
Joshua Redman,
Christian Wallumrød,
Johan Lindvall… Pour
Plastic Wave, sorti en 2021 chez
Odin Records, c’est le contrebassiste
Ole Morten Vågan qui partage l’enthousiasme du TJO. « AterMath Rock » a tout de l’orphéon : chœurs tonitruants, polyphonies éclatantes, interactions débridées, rythmique puissante… Le morceau évolue dans une ambiance nerveuse et musclée, quasiment du noise rock ! Le TJO et Vågan, c’est du free rock !
Slowly, Slowly - Siril Malmedal Hauge
La chanteuse
Siril Malmedal Hauge joue notamment
avec Alf Hulbækmo, Jacob Young… et son sextet, avec lequel la chanteuse a sorti Slowly, Slowly en mai 2021 sur le label Jazzland Recordings. Le groupe est constitué de Martin Myhre Olsen aux saxophones,
Torgeir Hovden Standal aux guitares,
Kjetil Mulelid au piano et à l’orgue,
Martin Morland à la basse et
Henrik Lødøen à la batterie. Sur des poly-rythmes touffus, heurtés et dansants, pimentés d’accents World Music, « Wooden Hotel » joue sur des dialogues entre le saxophone ou le piano, et la voix. Le phrasé clair et le timbre soyeux et léger d’Hauge, donnent au morceau des airs de folk.
Bashing Mushrooms – I.P.A.
I.P.A. fêtera ses quinze ans l’année prochaine ! Ce quintet est composé d’
Atle Nymo au saxophone ténor et à la clarinette basse,
Magnus Broo à la trompette,
Mattias Ståhl au vibraphone,
Ingebrigt Håker Flaten à la contrebasse et
Håkon Mjåset Johansen à la batterie. « Bashing Mushrooms », le morceau-titre du disque publié en 2020 par
Cuneiform Records, commence par un thème-riff exposé à l’unisson, dans l’esprit d’
Ornette Coleman. Les dialogues entre le ténor et la trompette, les envolées du saxophone, les lignes en arrière-plan du vibraphone… sur une walking véloce de la contrebasse et un chabada serré de la batterie, inscrivent le morceau dans une lignée néo-bop.
Deliverables – Knut Kvifte Nesheim
Sixième opus du batteur
Knut Kvifte Nesheim,
Deliverables est sorti en 2020 chez
Taragot Sounds. Outre Nesheim, le quartet comprend
Adrian Løseth Waade au violon,
Karl Hjalmar Nyberg au saxophone ténor et
Martin Miguel Almagro Tonne à la guitare. « I Will Circle Back To You » est un mélange de jeux rythmiques et de tourneries, avec un côté comptine, aux couleurs manouches. Un morceau original empreint de teintes folkloriques.
Phantasmagoria, or A Different Kind of Journey - The Eivind Aarset 4-tet
Eivind Aarset est bien sûr connu pour son rôle aux côtés de
Dhafer Youssef, mais sa carrière de leader ne compte pas moins d’une quinzaine d’opus sortis depuis 1998.
Phantasmagoria, or A Different Kind of Journey a été publié en 2021 chez
Jazzland Recordings. Dans « Outbound »,
Audun Erlien est à la basse et
Welte Holte et
Erland Dahlen sont à la batterie et aux percussions. Aarset recherche avant tout une ambiance globale : effets lointains denses, rythmique à tendance rock prog, ostinatos lancinants, traits mélodiques esquissés, phrases éthérées… « Outbound » évoque parfois une atmosphère de dance floor psychédélique.
Mensa Rotunda – OJKOS & Andreas Rotevatn
L’OJKOS (Orchestra of Jazz Composers in Oslo), co-fondé par le tromboniste
Andreas Rotevatn en 2018, est un orchestre d’une quinzaine de musiciens, basé à Oslo et membre des Grands Formats.
Mensa Rotunda, publié chez
Odin Records en 2022, est leur deuxième album, après
Alea Iacta Est, sorti en 2020. Dès le démarrage de « Fjordingen II », les percussions vives, légères et chaloupées rappellent les îles… Avec ses chœurs brillants, son thème à l’allure de samba, ses couleurs exotiques, apportées notamment par la flûte et ses chorus dynamiques de la trompette et du trombone, l’orchestre est joyeux. Le morceau sonne comme presque une descarga !
Notre Dame – Meditations And Prayers - Mathilde Groos Viddal
Sixième album de
Mathilde Grooss Viddal,
Notre Dame – Meditations And Prayers est sorti en 2020 chez
Losen Records. Comme son titre l’indique, le disque trouve sa suorce d’inspiration dans des psaumes, chorales, hymnes, prières… La saxophoniste et clarinettiste s’est entourée du trompettiste
Hayden Powell, du saxophoniste ténor
Børge-Are Halvorsen et du tromboniste
Øyvind Brœkke. En l’absence de section rythmique, la musique circule sans cesse : chacun avance son propos et rebondit sur celui des autres. Le quatuor possède une belle sonorité acoustique et les échanges sont particulièrement subtils. « Meditation » est un jazz de chambre contemporain.
Zvony - Michaela Antalová & Adrian Myhr
En plein covid,
Michaela Antalová et
Adrian Myhr décident de jouer tous les jours en duo. Les dialogues entre la fujara (flûte basse slovaque) et la contrebasse aboutissent à
Zvony, qui sort en 2021 chez
Hevhetia. La sonorité inhabituelle de la fujara – peut-être proche du son qu’aurait une grande flûte en bambou – et la contrebasse jouée à l’archet, profonde et grave, donnent au morceau éponyme un air de mélodie folklorique.
Fengselsfugl - Trond Kallevåg
Troisième disque de
Trond Kallevåg,
Fengselsfugl a été publié en 2021 chez
Hubro. Le guitariste adopte la formule du sextet avec
Adrian Løseth Waade au violon,
Geir Sundstøl aux guitares,
David Wallumrød aux claviers,
Alexander Hoholm à la contrebasse et
Ivar Myrset Asheim à la batterie. L’album a été conçu pendant le confinement, en partie dans la prison d’Oslo où Kallevåg œuvre à la réinsertion des détenus. Un son tenu en arrière-plan, une mélodie d’abord étrange, égrenée par la guitare et le piano, qui devient dansante, avec des accents country, sur une ligne de basse calme et des percussions subtiles... « Amerikabåten » (également le nom d’un quintet du guitariste) évoque ça-et-là une ronde folk.
... But Swinging Doesn't Bend Them Down - The Source
En 1993,
Øyvind Brœkke réunit trois compagnons du Trondheim Music Conservatory pour former The Source :
Trygve Seim aux saxophones,
Mats Eilertsen à la contrebasse et
Per Oddvar Johansen à la batterie.
... But Swinging Doesn't Bend Them Down est sorti en 2021 chez
Odin Records, mais « Dawn » a été composé en 2019, inconsciemment inspiré par l’aria « Lascia ch’io pianga » de
Georg Friedrich Haendel. « Dawn » est un morceau élégant, à l’image de l’introduction en duo entre la contrebasse et les cymbales de la batterie, des lignes mélodiques décalées ou des chorus du saxophone et du trombone, du thème exposé à l’unisson qui sonne à la
Ornette Coleman… Une musique ingénieuse !
Les trente morceaux et quelques cent cinquante musiciens sélectionnés dans la playlist Jazz Out Of Norway ne reflètent sans doute pas l’exhaustivité du jazz norvégien, mais en donnent un aperçu instructif, varié et captivant. Le Viking Jazz vaut incontestablement le voyage !