Le 30 novembre 2016,
il y a la foule au New Morning pour le concert d’Harold López-Nussa. C’est à
l’occasion de la sortie de El Viaje
chez Mack Avenue que le pianiste se produit rue des Petites Ecuries, avec le
bassiste Alune Wade et son frère, Ruy Adrián López-Nussa, à la batterie.
Pour le disque, le trio joue également avec le trompettiste Mayquel González et quelques invités :
les percussionnistes Dreiser Durruthy
et Adel González, ainsi que le
batteur Ruy Francisco López-Nussa
(père d’Harold et de Ruy Adrián…). Lors de la soirée, le trio reprend des
titres d’El Viaje, des morceaux plus
anciens et ajoute des morceaux traditionnels sud-américains.
Les rythmes sont évidemment au centre de la musique de López-Nussa :
polyrythmie explosive et foisonnante de la batterie ou du cajón, lignes
slappées et shuffle de la basse, accords latinos et ostinatos puissants du piano.
Typiquement dans la lignée de l’école cubaine, López-Nussa mêle la virtuosité du
classique à la danse, avec un lyrisme à fleur de doigts (« Lobo‘s Cha »).
Si la rumba et autres salsas sont omniprésentes, le pianiste fait également
référence à l’Afrique – Wade n’y est pas pour rien… –, au blues (« Me voy
Pa’Cuba »), à la folk (« Oriente ») et, bien entendu, au jazz (« Vamos
aqui », signé Tata Güines). Les
facilités techniques, l’aisance rythmique, le sens mélodique et la joie de
jouer de López-Nussa ne sont pas sans rappeler la démarche d’un Monty Alexander. Wade nage comme un
poisson dans l’eau dans cet environnement : des lignes de basse élégantes
(« Vamos aqui »), des riffs entraînants, du slap robuste (« El Carretero
») et des solos particulièrement mélodieux (« Paseo »), sans oublier sa
voix haut perchée, un peu comme une voix de tête, agile, touchante et qui
navigue d’une mélopée africaine à un danzón (« Tres lindas cubanas »).
Quant à Ruy Adrián, il en met partout, sans jamais se départir d’une musicalité
démonstrative, et maintient une pulsation entraînante. Ses interactions avec
son frère et Wade révèlent une grande connivence.
Même si les invités étoffent la palette sonore du disque, l’enregistrement
et le concert sont proches – équilibre et lisibilité des voix. En revanche,
voir sur le vif l’enthousiasme et la complicité évidente des deux frères est un
spectacle que la galette ne peut pas procurer, notamment pendant « Los Muñecos »,
un morceau savoureux d’Ignacio Cervantes joué à quatre mains par les deux frères, ou encore pendant le duo piano – cajón, « Cimaron ». Musique latine oblige, le public est sans doute plus
éclectique que celui des concerts de jazz habituels, avec, entre autres, quelques
danseurs invétérés qui investissent le fond du New Morning…
López-Nussa fait preuve d’un plaisir de jouer et
d’une bonne humeur musicale contagieux. Sa musique est un concentré de
simplicité virtuose…
Le disque
El viaje
Harold López-Nussa
Harold López-Nussa (p), Alune Wade (b) et Ruy Adrián López-Nussa (d), avec Mayquel González (tp), Dreiser Durruthy (perc), Adel González (perc) et Ruy Francisco López-Nussa (d).
Mack Avenue - MAC1114
Sortie le 23 septembre 2016
Liste des morceaux
01. « Me voy pa'Cuba », Aldo López-Gavilán (5:35).
02. « Africa » (5:07).
03. « Feria », Harold López-Nusa, Ruy Adrián López-Nussa & Thelonious Monk (3:55).
04. « Lobo's Cha », Ernán López-Nussa (5:25).
05. « Bacalao con pan », Chucho Valdés (3:39).
06. « El viaje » (5:13).
07. « Mozambique en Mi B », Miguel Nuñez (3:51).
08. « D'una fábula » (6:20).
09. « Inspiración en Connecticut » (6:05).
10. « Oriente » (5:36).
11. « Improv (Me Voy Pa'Cuba) », Aldo López-Gavilán (3:22).
Tous les morceaux sont signés López-Nussa, sauf indication contraire.