De
Nathalie Loriers à Maäk Spirit, en
passant par Steve Houben, Manuel Hermia, Olivier Hutman ou encore Lee
Konitz, Steve Grossman, Charlie Mariano, Harold Land… Outre-Quiévrain, SalLa Rocca est un contrebassiste particulièrement demandé ! Premier
disque sous son nom, Latinea sort en
2003 chez Igloo Records. Neuf ans plus tard, en 2012, toujours en quintet et
chez Igloo, mais avec de nouveaux musiciens, La Rocca enregistre It Could Be The End. L’artiste laisse
mûrir ses idées musicales avant de les graver : il aura fallu patienter
sept ans pour Shifted, publié en mai
2019 (IGL295).
La
genèse de Shifted remonte au début
des années quatre-vingts dix, quand La Rocca et le saxophoniste Jeroen van Herzeele décident de monter
un premier trio, puissant, mais éphémère, en compagnie du batteur Stéphane Galland. Ce n’est qu’une vingtaine
d’années plus tard que les deux amis relancent le projet, avec Lieven Venken derrière les fûts. Le
trio devient un quartet quand le claviériste Pascal Mohy les rejoint, en 2016. Phil Abraham et son trombone sont invités sur deux titres.
Cinq
morceaux de Shifted sont signés La
Rocca, Herzeele, Venken et Mohy en apportent un chacun et le neuvième est « Syndrome »,
une composition de Carla Bley.
Souvent
énergiques (« Shifted »), avec des nuances funky (« Ragga »), ou intimistes («
Waiting »), avec des accents majestueux (« Psalm »), les thèmes restent sophistiqués,
dans une veine à la fois moderne et tendue. Les ambiances sont variées et, tour
à tour, chambriste (« Bicycle »), hard-bop (« Syndrome »), cinématographique («
Last Kiss »), dansante (« Cache-Cash »)… Le quartet joue la carte de l’interaction :
contrechants élégants (« Waiting »), montée en tension dramatique (« Psalm »), questions-réponses
piquantes (« Wise One », « Ragga »), unissons efficaces (« Cache-Cash »),
dialogues astucieux (« Bicycle »)….
La
batterie est volontiers touffue (« Shifted »), toujours entraînante («
Cache-Cash »), avec ses motifs puissants (« Psalm ») et son chabada vigoureux («
Syndrome »). Elle sait également se montrer percussive (« Last Kiss »), presque
bruitiste (« Waiting ») ou bruissante aux balais dans « Bicycle ». Si les lignes
de contrebasse en imposent (« Last Kiss »), elles restent musicales (« Psalm »),
entraînantes (« Ragga »), vives (la walking de « Syndrome ») et les chorus sont
particulièrement mélodieux (« Wise One »), Econome (« Waiting »), le piano souligne
subtilement le discours des solistes (« Psalm »), sans se départir d’un swing dense
(« Psalm »), et déroule des variations dans un style contemporain, parsemé de lignes
dissonantes (« Bicycle ») et de clusters (« Syndrome »). Quant au saxophone, il
alterne discours free (« Shifted »), actuels (« Wise One ») et développements fluides
(« Bicycle »), le tout sous influence coltranienne (« Psalm », clin d’œil
évident à A Love Supreme…).
Dans
la lignée de It Could Be The End, Shifted marie avant-garde et tradition :
La Rocca et son quartet proposent une musique bien assaisonnée, un régal pour
les oreilles !
Le
disque
Shifted
Sal La Rocca
Jeroen Van Herzeele (sax), Pascal Mohy
(p, kbd), Sal La Rocca (b) et Lieven Venken (d), avec Phil Abraham (tb)
Igloo Records – IGL295
Sortie en mai 2019
Liste
des morceaux
01.
« Shifted » (4:18).
02.
« Waiting », Venken (4:39).
03.
« Psalm », Van Herzeele (9:44).
04.
« Wise One » (7:02).
05.
« Bicycle », Mohy (6:18).
06.
« Cache-Cash » (5:11).
07.
« Ragga » (6:10).
08.
« Syndrome », Bley (6:18).
09.
« Last Kiss » (3:43).
Tous
les morceaux sont signés La Rocca, sauf indication contraire.