13 juillet 2021

Laborie Jazz fait le printemps...

Le dynamique label limougeaud, Laborie Jazz, propose quatre productions printanières dans des styles qui reflètent l’éclectisme de sa ligne éditoriale : Derrière les paupières du trio Rouge sous la conduite de Madeleine Cazenave, piano – contrebasse – batterie ; Nomad du duo Simon Denizart & Elli Miller Maboungou, piano – percussions ; Impermanence du trio Lioness Shape mené par Manon Chevalier, voix – claviers – batterie ; et Résonances d’EricSéva Triple Roots, saxophone – basse – percussions.


Derrière les paupières
Rouge

Après le conservatoire de La Rochelle, puis des études à Toulouse, Bordeaux et Rennes, Madeleine Cazenave enregistre Octobre (2011) et Matines (2014) et travaille avec des compagnies de magie. C’est en 2017 que la pianiste monte son trio, Rouge, avec Sylvain Didou à la contrebasse et Boris Louvet à la batterie.

Derrière les paupières, premier disque de Rouge, sort le 16 avril chez Laborie Jazz. Cazenave signe les six compositions de l’album. Des mélodies aux allures de comptines (« Abysses »), un peu dans l’esprit de Yann Tiersen (« Petit jour », « Brumaire »), ou aux accents moyen-orientaux, à la Tigran Hamasyan, (« Etincelles »), jouxtent des thèmes-riffs entraînants (« 4% ») et autres mélodies élégantes (« Cavale »). Les morceaux se déroulent en plusieurs phases. Des introductions puissantes qui font appel aux techniques étendues – piano préparé (« Brumaire ») ou archet avec effets (« Abysses ») – précèdent les thèmes, souvent mélodieux, puis le trio rebondit sur des pédales (« Etincelles »), des ostinatos du piano et de la contrebasse (« Petit jour »), des riffs (« Abysses »), tandis que la batterie bruisse (« Abysses »)… Le trio s’engage ensuite dans des moments d’échanges intenses : l’ostinato devient pédale, les cymbales et les peaux crépitent et l’archet déchire les cordes dans une ambiance rock-progressif (« Petit jour »), ou sur les traces d’E.S.T.quand densité et lyrisme se marient (« Etincelles », « Brumaire »). Cazenave peut compter sur le soutien infaillible et dynamique (« 4 % ») de Louvet, et la carrure robuste et la musicalité (« Etincelles ») de Didou.

En exergue, Cazenave cite Michel Pastoureau : « Le rouge, c’est un océan ». Synesthésie ou pas, la pianiste et son trio proposent une musique à la fois raffinée et fiévreuse… un vrai rubis !

Le disque

Derrière les paupières
Rouge
Madeleine Cazenave (p), Sylvain Didou (b) et Boris Louvet (d).
Laborie Jazz – LJ60
Sortie le 16 avril 2021

Liste des morceaux

01. « Petit jour » (8:00).
02. « Etincelles » (8:58).
03. « Abysses » (7:55).
04. « Brumaire » (7:23).
05. « 4% » (7:28).
06. « Cavale » (6:02).

Tous les morceaux sont signés Cazenave.


Nomad
Simon Denizart & Elli Miller Maboungou

Simon Denizart n’en est pas à son coup d’essai : Nomad, qui sort le 23 avril 2021, est son quatrième opus, après Between Two Worlds (2015), Beautiful People (2016) et Darkside (2017), tous produits par le label québecois The 270 Sessions. Pour Nomad, Denizart joue en compagnie du percussionniste Elli Miller-Maboungou, membre de la compagnie de danse Nyata Nyata, leader du groupe afro-jazz Jazzamboka et rencontré pendant le séjour du pianiste au Canada. 

Les huit compositions, toutes signées Denizart, sont des éloges aux voyages et à la beauté (« Zoha »). Le morceau éponyme, évidemment, mais aussi Houston (« Last Night in Houston »), le « Square Viger » (l’un des premiers lieux publics musicaux de Montréal), le Sahara (« Lost in Chegaga »)…

Denizart mitonne ses mélodies aux petits oignons (« Zoha »), les assaisonne d’un lyrisme délicat (« Manon »), qui n’est pas sans rappeler le contrebassiste Avishai Cohen (« Square Viger »), ou d’un parfum cinégénique (« Oldfield 2.0 »), parfois épicé de nuances moyen-orientales (« Lost in Chegaga »). Marqué par la musique minimaliste, Denizart appuie la plupart de ses développements sur des vagues d’arpèges en boucles (« Nomad »), des ostinatos (« Oldfield 2.0 ») ou des motifs mélodico-rythmiques répétitifs (« Square Viger »). Les calebasses et autres percussions de Miller-Maboungou soutiennent le piano avec vivacité (« Manon »), puissance (« Last Night in Houston ») et une souplesse entraînante (« Lost in Chegaga »).

Nomad porte bien son nom : Denizart et Miller-Maboungou proposent une musique qui navigue entre tradition et modernité, jazz et monde, minimalisme et lyrisme… sans domicile fixe, quoi !

Le disque

Nomad
Simon Denizart (p) et Elli Miller Maboungou (perc)
Sortie le 23 avril 2021
Laborie Jazz – LJ63

Liste des morceaux

01. « Nomad » (6:01).
02. « Zoha » (3:48).
03. « Last Night in Houston » (3:46).
04. « Square Viger » (4:46).
05. « Manon » (5:49).
06. « Oldfield 2.0 » (6:48).
07. « Lost in Chegaga » (5:02).
08. « Outro » (0:37).

Tous les morceaux sont signés Denizart.

 
Impermanence
Lioness Shape

Impermanence – concept cher aux bouddhistes – est le premier disque de Lioness Shape et sort chez Laborie Jazz le 7 mai 2021. Le nom du trio, ’forme de lionne’, a peut-être été dicté par l’imposante chevelure de Manon Chevalier, qui orne la pochette du disque… Toujours est-il qu’outre la voix de Chevalier, ce trio toulousain est composé de la claviériste Maya Cros et de la batteuse Ophélie Luminati.

Au programme d’Impermanence, huit compositions de Chevalier et deux morceaux signées par deux ingénieurs du son : « Somos tantas » de Boris Beziat et « Blue Wooden Chair » de David Tarabbia.

Chevalier chante en anglais, en espagnol et en français. Registre medium (« El canto de mi deseo »), timbre clair (« L'origine »), diction discrètement voilée (« Blue Wooden Chair »), mise en place lissée (« The Last Lullaby »), ton légèrement psalmodique (« Somos tantas ») et effets de réverbération (« Tóg go bog é ») : tous les ingrédients d’un tour de chant pop rock prog sont réunis. Cros assure les riffs de basse (« Sand World ») et déroule des lignes tour à tour liquides (« Somos tantas »), cristallines (« My Tame Bird »), saturées (« L'origine »), lointaines (« Tóg go bog é »), psychédéliques (« Self-reliance »)… Pour sa part, Luminati joue avec puissance (« Water »), dans une veine plutôt rock (« L'origine »), binaire (« The last lullaby »), avec quelques touches funky (« Sand World ») et la régularité requise pour le style de Lioness Shape. Le trio parsème également son propos de quelques ingrédients jazz et world : un parfum de blues et un sitar (« Blue Wooden Chair »), des pépiements d’oiseaux dans une ambiance zen (« My Tame Bird »), une voix de saxophone (« Tóg go bog é »)…

Impermanence s’inscrit résolument dans la galaxie Indie Rock, Pop, New Wave… 

Le disque

Impermanence
Lioness Shape
Manon Chevalier (voc), Maya Cros (kbd) et Ophélie Luminati (d).
Laborie Jazz – LJ58
Sortie le 7 mai 2021

Liste des morceaux

01. « Somos tantas », Boris Beziat (4:41).
02. « Self-reliance » (4 :55).
03. « El canto de mi deseo » (3:52).
04. « Blue Wooden Chair », David Tarabbia (7:09).
05. « L'origine » (4:11).
06. « Sand World » (4:25).
07. « My Tame Bird » (6:21).
08. « Tóg go bog é » (3:55).
09. « The last lullaby » (5:33).
10. « Water » (5:29).

Tous les morceaux sont signés Chevalier, sauf indication contraire.

 

Résonances
Eric Séva Triple Roots

Depuis Folklores imaginaires, publié en 2005, Eric Séva trace sa route : il a fait partie de l’ONJ, participé à moult projets, enregistré une centaine de disques et sorti sous son nom Espaces croisés (2009), Nomade sonore (2015), Body & Blues (2017) et Mother of Pearl (2020). Résonances, nouveau jalon dans sa discographie, sort le 14 mai 2021 chez Laborie Jazz.

En compagnie de Kevin Réveyrand à la basse et Jean-Luc Di Fraya aux percussions et à la voix, Séva interprète six compositions de son cru et « Reason and Heart », signée Réveyrand. Le saxophoniste insiste sur « un besoin constant d'itinérance sonore » et, de fait, les titres des morceaux sont une invitation au voyage, d’Alicante à la canopée, en passant par Port Coton (à Belle-île?), le village d’Aoyha (introuvable sur la toile…), des étendues verdoyantes…

Les mélodies délicates (« Le village d’Aoyha »), voire des berceuses (« Reason and Heart »), sont traitées au saxophone soprano, tandis que le ténor déroulent des thèmes-riffs puissants (« Green Landscapes ») et des arabesques rapides (« Les roots d’Alicante »). L’ombre du blues plane sur le trio (« Luz de Port Coton », « Les roots d’Alicante », « Le village d’Aoyha »), porté par un swing vigoureux (« Green Landscapes »), des interactions raffinées (« Le village d’Aoyha ») et des rythmes dansants (passage en valse dans « Résonnance », presqu’un choro avec « Reason and Heart » ou binaire dans « Canopée »...). Les percussions de Di Fraya crépitent avec énergie et agilité (« Les roots d'Alicante »), foisonnent avec luxuriance (« Résonnance ») ou se font solennelles (« Canopée »). Çà et là il double la ligne du saxophone avec des vocalises (« Luz de Port Coton »). Réveyrand passe d’une ligne solide et sourde (« Les roots d’Alicante ») à des phrases mélodieuses (« Résonnances »), des contrechants pleins de tact (« Green Landscapes ») ou des motifs minimalistes (« Canopée »). Séva navigue entre modernité – envolées dissonantes (« Les roots d'Alicante »), fulgurances (« Résonnances »), volutes (« Canopée »), développement tendu (« Luz de Port Coton ») – et tradition – lyrisme au bout des doigts (« Reason and Heart »), effets de shouter (« Green Landscapes »), mise en place entraînante (« Luz de Port Coton »)…

Le Triple Roots de Séva porte bien son nom : Résonances trouve ses racines dans le blues, le jazz mainstream et ses développements modernes… Un cocktail réjouissant !

Le disque

Résonances
Eric Séva Triple Roots
Eric Séva (sax), Kévin Reveyrand (b) et Jean-Luc Di Fraya (perc, voc).
Laborie Jazz – LJ61
Sortie le 14 mai 2021

Liste des morceaux

01. « Les roots d'Alicante » (8:24).
02. « Luz de Port Coton » (6:19).
03. « Résonnances » (7:26)
04. « Le village d'Aoyha (5:25)
05. « Green Landscapes » (4:46)
06. « Reason and Heart », Reveyrand (3:43)
07. « Canopée » (6:22)

Tous les morceaux sont signés Séva, sauf indication contraire.