26 avril 2025

Hélène Duret partage ses émotions à l’Atelier du Plateau

Le 26 mars 2025 l’Atelier du Plateau présente la troisième et dernière création d'Hélène Duret, réalisée pendant sa résidence dans ce « lieu pluridisciplinaire dédié aux résidences, à la création et à la diffusion, autoproclamé Centre dramatique national de quartier ». Après le duo pop-jazz Couple Sympathique, en compagnie du saxophoniste ténor Quentin Biardeau, et un spectacle en solo, Duret propose une suite en sextet.

Hélène Duret – L’Atelier du Plateau – 26 mars 2025 © PLM


Duret commence par le théâtre et le cinéma à l’université de Montpellier avant de bifurquer vers la musique, via le Conservatoire à Rayonnement Régional de Montpellier, puis le Conservatoire Royal Flamand de Bruxelles. Au début de sa carrière, elle explore tour à tour le théâtre musical (Zorozora), les musiques balkaniques (Quatuor Syrto), antillaises (Le Bal de Marie-Galante) et indé (The Pool Sessions). En 2020, Suzanne – Duret, Maëlle Desbrosses à l’alto et Pierre Tereygeol à la guitare – est lauréate de Jazz Migration # 7. En 2023, avec Emile Parisien en invité, le trio publie Travel Blind. Dans l’intervalle, Duret a rejoint Tricollectif et monté le Synestet avec Sylvain Debaisieux au saxophone ténor, Benjamin Sauzereau à la guitare, Fil Caporali à la contrebasse et Maxime Rouayroux à la batterie. Le quintet sort Les usures en 2019, Rôles en 2022 et Live in Belgium en 2024. En parallèle, la clarinettiste joue aux côtés de Sauzereau et Rouayroux dans FUR, qui enregistre Boîte noire en 2021 et Bond en 2024.

Pour sa création à l’Atelier du Plateau, Duret s’entoure de Biardeau, Léa Chiechelski au saxophone alto et à la flûte, Delphine Joussein à la flûte, Jessica Simon au trombone et Ariel Tessier à la batterie. La suite est composée de cinq mouvements, « morceaux inspirés d’états émotionnels intenses ».

Hélène Duret Sextet – L’Atelier du Plateau – 26 mars 2025 © PLM


Le premier mouvement – environ vingt cinq minutes, soit la moitié de la durée de la suite – est constitué de plusieurs tableaux. Tout d’abord, une ligne de basse à la clarinette s’intercale avec les cliquetis de la batterie pour planter le décor rythmique. Le trombone et le saxophone alto rejoignent bientôt la section rythmique qui continue sur sa lancée, entraînante et régulière. Pendant ce temps, le saxophone ténor brode avec majesté des phrases aériennes. Il fait monter la tension, appuyé par la batterie et les soufflants qui s’emballent, avant de s’envoler lui-même vers un free sauvage, dans l’esprit des années soixante-dix. Le duo des flûtes assure la transition vers un chorus mainstream du trombone, sur un foisonnement rythmique énergique. La parole est ensuite aux flûtes, avec un chorus expressionniste de Joussein, à grand renfort de bruitages, effets électro, vocoder, déflagrations, souffles, cris, voix... toujours poussée par une batterie imposante. S’ensuit un mouvement apaisé, tremplin idéal pour le saxophone alto qui passe d'un discours fluide et majestueux à des lignes aériennes puissantes, portées par une batterie fougueuse et des unissons denses. 
 
Accalmie après la tempête, le deuxième mouvement commence comme une ode, duo étiré entre la clarinette basse et le trombone sur la batterie jouée aux mailloches pour renforcer l’ambiance solennelle. Le solo de la clarinette basse, mélodieux et élégant, s’intensifie avec les contre-chants des soufflants, dans une atmosphère de musique de chambre. 
 
« La joie », troisième mouvement, est marquée par un démarrage dansant, construit à partir d'un décalage des voix et des crépitements de la batterie, musicale et énergique de bout en bout. Sur un décor de riffs à l'unisson, la clarinette basse et la flûte chantent un air qui débouche sur un superbe chorus de la clarinette. Les croisements de voix du final évoquent la musique contemporaine. 
 
« Révolution » porte bien son titre : un démarrage abrupt dans un style fanfare introduit un thème vif, exposé par le trombone sur un rythme de marche. Le morceau part en vrille dans une ambiance totalement débridée. Tous les instruments s’émancipent avec furie, dans un développement free collectif que conclut un solo monumental de la batterie. 
 
Dernier mouvement de la suite, « Tragédie » repose sur une batterie en apesanteur, une clarinette basse et un trombone qui jouent un motif lancinant, tandis que les saxophones et la flûte exposent une mélodie entraînante. La flûte se lance ensuite dans un chorus expressionniste à base d’effets électriques , paroles, souffles, cris… Le morceau se clôture de manière théâtrale sur une longue pédale sinistre.

Expérimentale, mais assaisonnée d’ingrédients figuratifs, la musique de Duret est particulièrement expressive et son sextet envoie du lourd !