Depuis 1978 Igloo Records œuvre pour la diffusion du jazz
belge à travers le monde. Le label s’est également ouvert aux musiques du monde
(Igloomondo), aux musiques électro (Iglectic) et à la chanson (Franc’Amour et
Factice). Preuves de l’éclectisme et de la qualité des productions du label
Bruxellois : Road Story et Motion, deux disques du pianiste Igor Gehenot, Bees and Bumblebees du Fiorini
– Houben quartet, New Feel du LG
Jazz Collective et Austerity… And What About Rage? du saxophoniste Manuel Hermia.
Road Story
Igor Gehenot
Igor
Gehenot (p), Sam Gerstmans (b) et Teun Verbruggen (d)
Igloo – IGL 232
Sortie en mars 2012
En 2011, après être passé par l’académie Marcel Désiron, le
Conservatoire de Maastricht et le Conservatoire de Bruxelles, Gehenot commence
sa carrière... Il enregistre Road Story
pour Igloo l’année suivante, en trio avec Sam
Gerstmans à la contrebasse et Teun
Verbruggen à la batterie. Gehenot est l’auteur des dix morceaux.
Les mélodies sont le plus souvent délicates, avec des ballades
détendues ou des ambiances intimistes, servies par une section rythmique
entraînante, qui glisse ça-et-là des accents pop. Le trio emballe volontiers
les thèmes pour générer de la tension et s’aventure dans des passages funky ou
hard-bop, avec walking et chabada. La contrebasse joue en souplesse, tandis que
la batterie fourmille et que le piano chante.
Il y a bien sûr du Brad
Mehldau dans Road Story, mais
Gehenot a réussi à développer un vocabulaire et une syntaxe qui lui sont tout à
fait personnels.
Bees and Bumblebees
Fiorini – Houben quartet
Gregory
Houben (tp), Fabian Fiorini (p), Cédric Raymond (b) et Hans Van Oosterhout (d)
Igloo – IGL 249
Sortie en février 2014
« L’Happy-Culture », voilà comment le trompettiste
Gregory Houben et le pianiste Fabian Fiorini décrivent leur démarche
musicale. Enregistré en 2013, avec Cédric
Raymond à la basse et Hans Van
Oosterhout à la batterie, Bees and
Bumblebees ne déroge pas à la règle et transpire l’humour et la bonne
humeur.
Fiorini et Houben ont composé les dix thèmes, plutôt courts
et vifs avec, parfois, des consonances sud-américaines. D’un jeu de questions –
réponses entre le piano et la trompette à des unissons énergiques, en passant
par des contrepoints recherchés, les constructions musicales sont élégantes. La
régularité de la walking entrecoupée de shuffle de la basse et du chabada de la
batterie assure une base rythmique solide et dansante.
Marqué par le be-bop, les musiques latines et la musique
baroque, Fiorini – Houben quartet s’inscrit dans la lignée du West Coast Jazz,
sur les traces de Bobby Jaspar… Bees and Bumblebees est une musique que
l’on prend plaisir à butiner !
Motion
Igor Gehenot Trio
Igor Gehenot (p), Philippe Aerts (b) et Teun Verbruggen (d)
Igloo – IGL 253
Sortie en septembre 2014
En 2009, Gehenot monte son premier trio avec Gerstmans et le
batteur Antoine Pierre. Dans le trio
de Road Story, Verbruggen succède à
Pierre et, en 2014, pour Motion,
c’est Philippe Aerts qui remplace
Gertsmans.
Gehenot signe neuf thèmes et reprend « In The Wee Small
Hours of The Morning », chanson composée en 1955 par David Mann et Bob Hilliard
pour l’album éponyme de Franck Sinatra.
Les pédales, ostinatos et autres riffs d’accords du piano,
soutenus par une section rythmique puissante et énergique font pencher Motion vers l’esprit d’EST, mais
toujours avec le bop en filigrane (walking, chabada et rim shot…). Road Story confirme les talents de fin mélodiste
de Gehenot, mais aussi son attachement à un jazz qui balance...
New Feel
LG Jazz Collective
Jean-Paul Estievenart (tp, bg), Steven Delannoye (ts, ss),
Laurent Barbier (as), Guillaume Vierset (g), Igor Gehenot (p), Felix
Zurstrassen (b) et Antoine Pierre (d).
Igloo – IGL 258
Sortie en novembre 2014
En 2012, le guitariste GuillaumeVierset monte le LG Jazz Collective pour interpréter des compositions
d’artistes liégeois dans le cadre du festival Jazz à Liège. Outre Vierset, le
septuor est constitué de Jean-Paul
Estievenart à la trompette ou au bugle, Steven Delannoye au saxophone ténor ou soprano, Laurent Barbier au saxophone alto, Felix Zurstrassen à la basse, plus deux
connaissances : Gehenot au piano et Pierre à la batterie.
Dans New Feel. Le
LG Jazz Collective interprète six compositions de Vierset, une de Pierre,
« A » du batteur Lionel Beuvens,
« Toscane » du guitariste Philip
Catherine et « Carmignano » du pianiste Eric Legnini.
Des mélodies recherchées, des accompagnements relevés, des
rythmes enjoués… les arrangements de Vierset sont tirés au cordeau. Les
unissons encadrent les solos, soutenus par les lignes inventives du piano, les
cliquetis foisonnants de la batterie et les chœurs discrets des soufflants. Avec
ses accents groovy et sa section rythmique robuste, la musique de New Feel frétille.
Austerity… And What
About Rage?
Manuel Hermia Trio
Manuel
Hermia (ts, ss, bansuri), Manolo Cabras (b) et Joao Lobo (d).
Igloo – IGL 261
Sortie en mars 2015
Saxophoniste et spécialiste du bansuri, Manuel Hermia navigue entre musique du monde, « rock ethno
coltranien » et jazz contemporain. Depuis 2010, Hermia, Manolo Cabras à la contrebasse et Joao Lobo à la batterie forment un trio
free qui explore notamment le « rajazz » - subtile combinaison de
râgas indiens et de jazz.
Austerity… And What About Rage? est un
cri contre les politiques d’austérité et la dégradation du bien-être, comme
Hermia l’écrit dans le livret : « en tant qu’être humain et citoyen,
je me sens éminemment concerné par ce qui se déroule sous mes yeux, et si j’ai
tenu à renouer ce lien entre jazz et politique c’est parce que l’attitude philosophique
inhérente au free jazz nous invite à ne pas accepter les règles préétablies
visant à conditionner tout un chacun à une forme d’acceptation soumise ».
Les onze cris de révoltes sont l’œuvre de chacun des trois musiciens. L’ardente
peinture de la couverture du disque, et le décor tachiste du livret sont signés
Sandra Corbisier.
Hermia laisse beaucoup d’espace à la basse et à la batterie pour
instaurer une véritable discussion entre les trois musiciens et, comme dans les
râgas, chaque morceau évolue dans une ambiance bien à lui. Concision des
phrases, liberté et puissance des motifs de basse, densité des rythmes, intensité
des interactions et… des cris furieux paroxysmiques ! A côté des envolées
free, le dernier morceau d’Austerity,
« Revelations », dans lequel Hermia joue notamment du bansuri,
propose une méditation apaisée très coltranienne.
Austerity… And What About Rage? reprend
des ingrédients du free jazz des années soixante à soixante-dix, mais Hermia,
Cabras et Lobo les mettent à leur sauce et concoctent un mets musical savoureux.