En 2000, Benjamin de la Fuente, Samuel Sighicelli et Benjamin Dupé, trois compositeurs contemporains sortis du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, créent Sphota, une « coopérative d’invention musicale ». C’est dans le cadre ce collectif qu’en 2004, de la Fuente et Sighicelli montent Caravaggio, avec Bruno Chevillon et Eric Echampard. Leur premier opus, Caravaggio #1, sort en 2005 sur le label INA GRM, suivi de Caravaggio #2 (2012) et Turn Up (2016) chez La Buissonne et, en janvier 2020, Tempus Fugit pour Eole Records.
Tempus Fugit n’est sans doute pas une référence au « Tempus Fugit » (ou « Tempus Fugue-It ») que Bud Powell a composé en 1949, mais peut-être au morceau de Yes (Drama – 1980), voire au vaisseau de Valérian et Laureline… En tous cas la musique de Caravaggio accompagnerait parfaitement l’ambiance futuriste de la bande dessinée de Pierre Christin et Jean-Claude Mézières. Quoi qu’il en soit, cet album de Caravaggio s’intéresse au temps qui file ! Et le quartet embarque Serge Teyssot-Gay (Noir Désir, Interzone, Zone libre, Kit de Survie…) dans une étape de son périple spatio-temporel sonore (« Vers la Flamme »)…
Les six morceaux ont été composés par Caravaggio et leurs titres évoquent le cinéma (« Travelling », « 70 MM » et « Jessica Hyde », l’héroïne de la série Utopia), la chanson (« My Way »… « Winding Roads » qui rappelle « The Long and Winding Road » du disque Let It be des Beatles) et la musique classique (« Vers la flamme » est aussi le titre d’une pièce pour piano d’Alexander Scriabine).
L’écoute de Tempus Fugit plonge définitivement l’auditeur dans le septième art : les voix off, insérées ça-et-là, sont explicites. Des grésillements électriques, stridences subites, bruitages minimalistes, grondements sourds, claquements mystérieux, tintements synthétiques, nappes de sons lointaines, souffles obscures… forment des décors interstellaires (« Travelling ») ! Les rythmes électro-rock (« Vers la flamme »), ponctués de martèlements lourds, de riffs saturés, de roulements sourds et de frappes puissantes montrent qu’on ne rigole pas tous les jours dans l’espace (« Winding Roads ») ! Un leitmotiv de quatre notes (« Jessica Hyde »), quelques bribes mélodiques (« My Way ») ou une esquisse de thème (« 70 MM ») mettent des touches humaines dans cet univers cosmique. Une scène expressionniste – grondement de moteur, crissements de pneus, verre brisé, bruit de radio… – rappelle que la terre n’est pas loin (« 70 MM »)… à moins que ce soit la bande son d’un vieux polar visionné dans une navette spatiale !
Combinaison de musique concrète, d’électro et de rock progressif, Tempus Fugit a tout de la bande originale d’un de film de science-fiction : ses sonorités mystérieuses et planantes invitent au voyage dans l’espace intersidéral…
Le disque
Tempus Fugit
Caravaggio
Benjamin de la Fuente (vl, électro), Samuel Sighicelli (Kbd), Bruno Chevillon (b, électro) et Eric Echampard (d), avec Serge Teyssot-Gay (g).
Eole Records – Eor_018
Sortie le 29 janvier 2020
Liste des morceaux
01. « Jessica Hyde » (08:31).
02. « My Way (a) » (04:13
03. « My Way (b) » (06:08
04. « Winding Roads » (08:03
05. « Travelling » (05:57
06. « Vers la Flamme (a) », Caravaggio & Teyssot-Gay (03:55).
07. « Vers la Flamme (b) », Caravaggio & Teyssot-Gay (04:17).
08. « 70 MM » (08:54).
Tous les morceaux sont signés Caravaggio, sauf indication contraire.