En plus de ses activités autour de la poésie, de la danse et de l’image, et la pédagogie, Jérôme Lefebvre trouve encore le temps de monter des projets musicaux : le TransJura 4tet avec Yves Cerf, Christophe Lincontang et Paolo Orlandi, le Jérôme Lefbvre Trio aux côtés de Lincontang et Sangoma Everett, les duos Lefebvre <> Orti, avec Guillaume Orti, et Les Jérômes, en compagnie de Jérôme Regard, le spectacle solo Maintenant, et le FMR Orchestrâ, créé en 2021.
Outre Lefebvre à la guitare, le FMR Orchestrâ est constitué de Loïc Vergnaux aux clarinettes (Quostet, Kolm, Minimistan, Liken...), Timothée Quost aux trompettes et électro (Quostet, Dawàa, Mraolia, Liken...), Orti aux saxophones (Hask, Mercoledi & Co, D.U.O., MegaOctet, Kartet, Mâäk, Thôt...), Benoît Keller à la contrebasse (Trio 928, Trio Résisteances, ODOS…) et Daniel Jeand’heur à la batterie (PAX, Tôk, Full Tree, One Shot...). Le sextet sort Jusqu’où s’évapore la musique le 1er mars 2024 chez Altrisuoni et présente le disque au Triton le 22 février.
Jérôme Lefebvre - Daniel Jeand'heur - Benoît Keller - Timothée Quost - Loïc Vergnaux - Guillaume Orti (c) PLM |
La première transition prend une tournure bruitiste, avec des glissandos, notes tenues, modulations, sirènes… puis débouche sur « Le petit matin du peintre », qui démarre sur un ostinato suraigu lancinant. La trompette reprend ensuite le motif, soutenu par une contrebasse et une batterie dynamiques, et la guitare se lance dans un chorus dans une ambiance entre blues et rock progressif.
La clarinette volette en toute légèreté dans la deuxième transition. Les cliquetis de la rythmique sur les boucles étirées de la guitare et de la basse plongent « La sieste » dans une atmosphère entre cirque et cabaret, avec des accents klezmer et des sonorités d’orgue de barbarie. Quost ajoute de l’électro en jouant de sa trompette sans embouchure au-dessus d’un micro relié à une boite d’effets gutturaux, cris, éructations, souffles…
Keller et Jeand’heur jouent une transition sépulcrale, qui annonce magistralement la « Grave ballade », courte pièce à l’unisson, lente et mystérieuse. La transition d’Orti part dans une direction totalement différente, basée sur les techniques étendues : claquement de langue, double-notes, sauts d’intervalles, vocalises, motifs plaintifs… Sur une rythmique sourde, « Strange Feeling » évoque d‘abord les mélodies tourmentées d’Albert Ayler, puis se transforme rapidement en fanfare déjantée, plutôt dans l’esprit de Charles Mingus. Le chorus de Lefebvre navigue entre rock et jazz, avec des touches bluesy. « Yves » (clin d’œil à Yves Cerf ?) est lancé sans transition, avec une mélodieuse sérénité, avant que Quost et Vergnaux ne lâchent les rênes dans des solos à ascendant free.
La transition de Quost alterne atmosphère cinématographiques et science-fiction, alors que « Jusqu’où s’évapore la musique ? s’aventure plutôt vers les îles, porté par le timbre acoustique de la guitare, les bruitages lointains et un climat d’ensemble nonchalant…
Le dernier mouvement, « Bordello con expressividad », est une reprise du disque éponyme enregistré en 2011 par Lefebvre avec James Mac Gaw et Jean-Yves Roucan. Le morceau prend des allures rock progressif, avec les soufflants qui jouent un arrière-plan puissant et la rythmique qui foisonne, jusqu’au solo imposant de Jeand’heur...
Lefebvre et ses compères proposent une musique fringante et simplement savante, sorte de Fanfare Moderne Rêveuse. Sublimation d’une suite, Jusqu’où s’évapore la musique ? confirme qu’il serait dommage que cet orchestre soit éphémère !
Liste des morceaux