Tous les deux passés par le Conservatoire à Rayonnement
Régional de Tours, le vibraphoniste Renaud Detruit et l’accordéoniste Florent
Sepchat ont monté DUO au sein de La Saugrenue, collectif de musiciens
tourangeaux, créé il y a près de quinze ans. Leur premier disque, le bien nommé
Fines Lames, sort en mars 2017 chez
Cristal Records.
Yves Verne,
musicien lyonnais, a composé quelques pièces pour vibraphone et accordéon, Sofia Ahjoniemi et Julien Mégroz marient également ces deux instruments… mais dans les
deux cas, il s’agit de musique contemporaine. En jazz, ce type de duo reste une
association exceptionnelle, alors que le vibraphone et le marimba ont déjà
croisé leurs notes avec d’autres instruments en duo : il y a évidemment le
piano, à l’instar du célébrissime duo Gary
Burton – Chick Corea, mais aussi
Milt Jackson – Oscar Peterson, Bobby
Hutcherson – McCoy Tyner, Stefon Harris – Kenny Barron ou Jacky
Terrasson, voire Vassilena
Serafimova – Thomas Enhco… A
relever également des dialogues avec guitare (Tom Beckham – Brad Shepik),
contrebasse (Tamas Teszary – Nick Webster) ou saxophone baryton (Franck Tortiller – François Corneloup). Sinon, Joe
Locke est l’un des vibraphonistes
qui a le plus expérimenté la formule du duo : avec le piano, évidemment
(Warren Wolf ou Geofrey Keezer), la harpe (Edmar
Castanada), le marimba (Christos
Rafalides)… Mais toujours pas de trace du piano à bretelles ! Pourtant
les accordéonistes semblent férus de duos : à commencer par Richard Galliano qui dialogue avec la
contrebasse de Ron Carter, l’orgue
d’Eddy Louiss, la clarinette de Michel Portal ou la guitare de Sylvain Luc. Didier Ithursarry n’est pas en reste non plus : il passe du
piano de Jean-Marie Machado ou de Jean-Luc Fillon au trombone de Sébastien Llado, puis au saxophone de Christophe Monniot. Vincent Peirani, lui, joue avec le
piano de Michael Wollny, le
saxophone d’Emile Parisien ou de Vincent Lê Quang et la clarinette de Michel Portal. Lionel Suarez a mis ses soufflets au service de la voix d’André Minvielle, du violoncelle de Pierre François Dufour… La liste n’est
pas exhaustive, mais il n’y a pas le moindre vibraphone à l’horizon… Fines Lames est donc peut-être une
première en jazz !
Detruit et Sepchat interprètent quatre compositions du
vibraphoniste, « Vasco », écrite par Pablo Pico pour le duo, « Pouki Pouki » d’Airelle Besson, « Very Early »
de Bill Evans, « Sang Mêlé » d’Eddy
Louiss et deux pièces tirés des Mikrokosmos
de Béla Bartók (les numéros 116 et
153).
Le vibraphone, cristallin, le marimba, boisé, et l’accordéon,
vibrant, se partagent des mélodies nostalgiques (« Vasco », « Nuit
rouge »), mystérieuses (« Reflets d’influences »), chantantes (« Pouki
Pouki »), dansantes (« Very Early »)... Ils alternent unissons (« Mikrokosmos
n°116 ») et contrechants (« Avec un peu de ça »). Detruit
et Sepchat jouent avec les rythmes et échangent constamment leur rôle : les
morceaux zigzaguent entre pédales (« Reflet d’influence »), ostinatos
(« Vasco »), boucles évolutives (« Mikrokosmos n°153 »), riffs
(« Pouki Pouki ») et autres motifs entraînants (« Sang mêlé »).
Si Detruit et Sepchat restent essentiellement sur un terrain jazz, ils
intègrent également des éléments de musique répétitive (« Vasco ») et
contemporaine (« Mikrokosmos n°153 »), mais aussi de musique du monde
(« Avec un peu de ça »).
Detruit et Sepchat forment un duo inouï et les Fines Lames font mouche grâce à leur
approche, élégante et spontanée.