29 mars 2020

Silence The 13th – Thomas Delor

Après The Swaggerer, sorti en 2018, le batteur Thomas Delor revient sur disque, toujours en compagnie de son trio – Simon Martineau à la guitare et Georges Correja à la contrebasse – et toujours chez Fresh Sound New Talent. Publié en février 2020, Silence The 13th s’articule autour de six morceaux composés par Delor, un standard de jazz, « My Little Suede Shoes » de Charlie Parker, un classique de la musique romantique, « Prélude 20 Opus 28 » de Frédéric Chopin et un tube de la chanson française, « Que reste-t-il de nos amours » de Charles Trénet.

« Le silence ne pourrait-il pas être considéré comme un son, voire comme une treizième note » se demande l’artiste dans les notes de la pochette : la boucle avec le titre du disque est bouclée ! Et nous pouvons faire confiance à l’ex-mathématicien qu’est Delor pour manier « Syllogism » avec adresse : « Le noir est une couleur. L’absence de couleur est noire. L’absence de couleur est donc une couleur. » Dans ce premier morceau, le trio commence dans un esprit contemporain – bruitages et minimalisme – poursuit dans une veine quasiment romantique avec la contrebasse à l’archet, puis passe à un rock véloce, tiré par la guitare, suivi d’un solo puissant de la batterie, avant de revenir à la musique minimaliste pour la conclusion. « Silence the 13th » porte bien son nom : des notes isolées, sur une batterie lointaine, progressent lentement, mais sûrement, comme une ode, jusqu’à ce que la batterie profite des incartades de la guitare pour faire monter la pression. « Peaux pourries » est une introduction mélodieuse sur les fûts pour « My Little Suede Shoes ». Pris sur un rythme de calypso et avant de partir dans un développement post-bop, le thème de Bird est exposé et déroulé en duo, par la batterie et la guitare, sur une ligne solide de la contrebasse et avec des citations dans tous les sens (« La Cucaracha », « Tequila »...). Une batterie discrète, une contrebasse grave – avec un chorus mélodieux – et une guitare apaisée appellent la « Providence Incitation ». Après des préliminaires funky, « Minefield » alterne walking et chabada rapides, mouvements linéaires et blues pénétrant. Le trio tourne autour de « Que reste-t-il de nos amours ? » en rebondissant sur les harmonies sans s’attarder sur la rengaine… La contrebasse reprend la ligne mélodique du Prélude numéro 20 de l’Opus 18 comme une basse continue et laisse le soin à la batterie de gérer la tension et à la guitare de s’envoler dans une ballade jazz-rock. Logique, le trio conclut sur « Une soupe, et au lit » : walking épicée de shuffle et chabada pimenté de rim shot encadrent les élucubrations bop de la guitare.

Dans Silence The 13th, Delor et ses acolytes mettent en son des saynètes enjouées et bariolées.

Le disque

Silence The 13th
Thomas Delor
Simon Martineau (g), Georges Correia (b) et Thomas Delor (d).
Fresh Sound New Talent – FSNT-592
Sortie en février 2020

Liste des morceaux

01. « Syllogism » (9:49).
02. « Silence the 13th » (8:16).
03. « Peaux pourries » (1:07).
04. « My Little Suede Shoes », Parker (5:51).
05. « Providence Incitation » (6:33).
06. « Minefield » (7:25).
07. « Que reste-t-il de nos amours ? », Trénet (5:17).
08. « Prélude Op. 28, No. 20 », Chopin (7:05).
09. « Une soupe, et au lit » (5:52).

Tous les morceaux sont signés Delor sauf indication contraire.

28 mars 2020

Howls – Thomas Boffelli

Monté par le trompettiste Thomas Boffelli, Howls est un quintet à l’instrumentation des plus bop, avec Jérôme Girin au saxophone ténor, Matthieu Marthouret au piano, Sylvain Dubrez à la contrebasse et Damient Françon à la batterie. Le premier album éponyme du combo sort le 27 septembre 2019 chez We See Music Records.

Les sept compositions sont signées Boffelli et deux intermèdes – « Ho » et « Ow » – débouchent sur la ballade « Ls ». Howls s’appuie sur des mélodies élégantes (« Howls ») et des thèmes-riffs efficaces (« Riding The Sun »), le plus souvent exposés à l’unisson (« Le bâton et la pluie ») et parfois précédés d’introduction au caractère solennel (« Close Path »). La rythmique assure un balancement frétillant et léger : la batterie foisonne (« Totem ») et ses roulements crépitent (les stop-chorus dans « Riding The Sun »), la contrebasse pimente ses lignes de shuffle entraînants (« Howls ») et de phrases bondissantes (« Papoose »), quant au piano, ses suites d’accords (« Close Path ») et autres motifs arpégés (« Ls »), il souligne discrètement, mais sûrement les propos de ses collègues. Un brin de nonchalance (« Ls »), un son rond (« Papoose ») et des discours sinueux, mais vif (« Totem ») placent le saxophone ténor à mi-chemin entre le hard-bop et la West Coast. Avec sa sonorité veloutée et douce, la trompette, volontiers lointaine (« Howls »), joue dans un registre soyeux(« Papoose »), voire fragile (« Close Path ») avec des passages bop (« Le bâton et la pluie »). Les morceaux sont structurés sur le modèle thème – solos – thème (« Papoose ») et les développements donnent également lieu à des contrepoints raffinés (« Riding The Sun »), questions-réponses piquantes (« Papoose ») et autres dialogues croisés (« Howls »).

Howls propose une musique dynamique, bâtie dans une lignée post-bop moderne.

Le disque

Howls
Howls
Thomas Boffelli (tp), Jérôme Girin (ts), Matthieu Marthouret (p), Sylvain Dubrez (b) et Damien Françon (d)
We See Music Records
Sortie le 27 septembre 2019

Liste des morceaux

01. « Howls » (07:20).
02. « Ho » (01:35).
03. « Papoose » (05:21).
04. « Close Path » (07:37).
05. « Ow » (01:49).
06. « Le bâton et la pluie » (06:04).
07. « Riding The Sun » (04:32).
08. « Ls » (04:01).
09. « Totem » (05:10).

Tous les morceaux sont signés Boffelli.

24 mars 2020

Ornithologie - Un Poco Loco

En 2014, Fidel Fourneyron monte Un Poco Loco avec des collègues du CNSMDP et du collectif Umlaut : Geoffroy Gesser au saxophone ténor et à la clarinette et Sébastien Beliah à la contrebasse. Le trio sort un premier disque éponyme en 2014, dans lequel il reprend divers standards comme « Tin Tin Deo », « A Night In Tunisia », « Manteca », « Opus De Funk », « Un poco loco »… Puis, en 2017, Un Poco Loco s’attaque à West Side Story et publie Feelin’ Pretty. Et comme chacun sait que tous les chemins de l’étude des oiseaux du jazz mènent à Bird, Fourneyron et ses acolytes consacre leur troisième opus, Ornithologie, à la musique de Charlie Parker. Le disque sort le 19 février 2020, toujours chez Umlaut Records.

A tout seigneur tout honneur, Un Poco Loco joue seize morceaux de Bird et « Everything Happens To Me », tube écrit en 1940 par Tom Adair et Matt Denis. Le trio regroupe « Barbados », « Billie’s Bounce » et « Now’s The Time » dans le medley « Barbillie’s Time » et enchaîne « Mango Mangue » avec « Donna Lee ».

Le trio s’en donne à cœur joie pour exposer les thèmes en staccato à l’unisson (« Segment »), sous forme de contrepoints fugués (« Chasin’ The Bird »), à coups de technique étendue (« Salt Peanuts »), à la manière d’une fanfare (« Okiedoke »)… Malin, Un Poco Loco s’arrange pour varier les dialogues, jongler avec les notes, glisser des touches d’humour et faire tournoyer les rythmes pour tenir en haleine l’auditeur (« Barbillie’s Time »). Les développements parcourent l’histoire du jazz, d’un revival New Orleans (« Mango Mangue ») à un free bluesy (« Bluebird ») en passant par le bop (« Shaw ‘Nuff ») ou le Third Stream (« Yardbird Suite »). En l’absence de batterie et d’instrument harmonique, Beliah court du four au moulin pour maintenir une carrure solide à grand renfort de walking trépidante (« Anthropology »), de pédale soutenue (« Groovin’ High »), chorus grave (« Mango Mangue – Donna Lee ») ou coups d’archet en folie (« Bluebird »). Gesser et Fourneyron jouent au chat et à la souris entre deux séries de questions – réponses bien senties (« Ah Leu Cha »), des contre-chants dynamiques (« Mango Mangue – Donna Lee »), des mouvements solennels (« Everything Happens To Me »), des jeux mélodiques (« Shaw ‘Nuff ») et des chase plein de vitalité (« Salt Peanuts »).

Un Poco Loco s’amuse à déconstruire et reconstruire les thèmes de Parker dans une atmosphère jubilatoire et le joyeux charivari d’Ornithologie mettra tout le monde de bonne humeur !

Le disque

Ornithologie
Un poco loco
Fidel Fourneyron (tb), Geoffroy Gesser (ts, cl) et Sébastien Beliah (b).
Umlaut Records – UMFRCD31
Sortie le 19 février 2020

Liste des morceaux

01. « Shaw Nuff » (3:33).
02. « Yardbird Suite » (2:15).
03. « Anthropology » (3:35).
04. « Salt Peanuts » (3:53).
05. « Barbillie's Time » (3:40).
06. « Everything Happens to Me », Adair & Denis (4:28).
07. « Ah Leu Cha » (2:47).
08. « Okiedoki » (3:20).
09. « Chasin the Bird » (2:50).
10. « Segment » (2:55).
11. « Mango Mangue - Donna Lee » (5:40).
12. « Groovin High » (3:17).
13. « Bluebird » (3:57).

Tous les morceaux sont signés Parker, sauf indication contraire.

21 mars 2020

A la découverte de Mehdi Nabti

Docteur en anthropologie, Mehdi Nabti est un spécialiste du soufisme, de la musique berbère et, plus généralement de la musique d’Afrique du nord. Musicien, il construit une œuvre qui fusionne subtilement le jazz contemporain et les traditions musicales du Maghreb. Une voie originale qui mérite une découverte plus approfondie…


La musique

J’ai commencé par la guitare classique au conservatoire de six à quatorze ans. A cette époque, un de mes oncles m’a offert une compilation de Charlie Parker sur une cassette. J’ai adoré ! En 1989, ce même oncle m’a amené voir Miles Davis au Zénith de Paris, et, en 1990, Grover Washington à La Villette. Voilà pourquoi j’ai voulu jouer du saxophone…


Mehdi Nabti (c) D.R.

J’ai découvert le jazz quand j’étais enfant car mes oncles écoutaient un tas de musiques : du jazz bien sûr – Bird, John Coltrane, Sonny Rollins, Washington, Davis... –, mais aussi de la musique funk afro-américaine – James Brown, Earth Wind & Fire, Michael Jackson, George Benson –, du reggae, du disco et du hip-hop. Dans les années quatre-vingt, l’un de mes oncles jouait de la guitare basse et prenait des cours à Montreuil avec le batteur Kenny Clarke, qui avait joué, entre autres, avec Bird, Dizzy Gillespie, Davis, Thelonious Monk, Coltrane... J’avais une dizaine d’années et parfois, j’accompagnais mon oncle : Clarke apprenait des standards à ses élèves, mais revisités au goût du jour. Pour moi, le jazz a toujours été une des nombreuses facettes de la musique populaire afro-américaine. Et c’était la musique qu’on écoutait le plus en famille, avec le folklore maghrébin, particulièrement berbère.

Jusqu’à dix-neuf ans, j’ai appris le saxophone classique, puis j’ai étudié avec Francois Jeanneau de 1997 à 2000. Entre 2000 et 2002, j’ai suivi des cours avec Philippe Sellam, Andy Emler et Steve Coleman. Pour le saxophone Bird reste ma référence ultime car il a tout... J’aime aussi énormément certains albums de Trane et de Monk. En réalité je suis bon public ! J’aime beaucoup de saxophonistes dans des styles très différents : Washington, Albert Ayler, Manu Dibango, Jackie McLean, Steve Coleman, Eddie Lockjaw Davis, Johnny Griffin, Dexter Gordon, Jeanneau... sans compter tous les autres ! J’en aime trop, je les aime tous ! La liste serait évidemment incomplète sans les nombreux musiciens classiques qui m’inspirent, à commencer par Johann Sebastian Bach et Béla Bartók, mais aussi des musiciens du Maghreb qui m’ont considérablement influencé comme l’Orchestre national de Barbès, Oudaden, Nass El Ghiwane, Jil Jilala et, surtout, les musiciens de transe rituelle Aïssawa – Said Berrada, Abdellah Yaakoubi, Hadj Azzedine Bettahi – et Hamadcha – Abderrahim Amrani.

De 2003 à 2007, j’ai intégré le groupe de percussions du batteur compositeur Eric Beaudet. Il m'a appris énormément sur le phrasé et l'arrangement rythmique. J’y jouais de la clave, du saxophone, de la flûte et de la ghayta, le hautbois marocain. Pendant quelques années, à Paris, j'ai aussi participé à de nombreux groupes de folklore et de transe maghrébins, mais aussi de funk et de house. De 2004 à 2008, j'ai créé Aissawaniyya, un orchestre franco-marocain de jazz-world qui réunissait des musiciens de jazz et des musiciens soufis marocains. Avec Aissawaniyya, nous avons donné des master-classes, enregistré des sessions inédites au Maroc, en Espagne et en France, et joué dans différents festivals en Europe, au Maghreb et au Canada. Depuis 2012, je produis et publie régulièrement des albums de mes divers groupes – Nass Lounassa, Pulsar3, Pulsar4, NeoDuo et Prototype – sous licence SOCAN et disponibles sur Bandcamp. En 2015, le label de jazz anglais F-IRE a publié une compilation – Multiple Worlds – de treize compositions personnelles interprétées avec mon groupe Pulsar4. 




Cinq clés pour le jazz

Qu’est-ce que le jazz ? Jazz = Improvisation + Groove + Invention + Beau son...

Pourquoi la passion du jazz ? Chaque musicien apporte sa pierre, selon ses capacités, et la pose sur la pyramide du jazz.

Où écouter du jazz ? Seul... avec un casque ou un bon système hifi.

Comment découvrir le jazz ? Il faut en écouter beaucoup ! Et chercher ce qui vous plaît car le jazz a plus de cent ans et il est particulièrement vaste... Ne vous arrêtez jamais sur un album ou un artiste qui vous a déplu, continuez à chercher et vous finirez par trouver !

Une anecdote autour du jazz ? Coltrane est chez Monk et ils travaillent une composition de Monk. Ce dernier joue un accord sans tierce. Coltrane lui demande :
– Qu’as-tu joué ?
Un sol mineur sans tierce.
Comment sais-tu que c’est un accord mineur s’il n’y a pas de tierce ?
Parce que je le dis : c’est un accord mineur sans tierce.
Mais moi je joue quoi alors ?
– Tu te débrouilles...


Les bonheurs et regrets musicaux

Ma plus belle réussite est d’avoir continué la musique sans me décourager. Le fait d’avoir pu composer, produire et diffuser moi-même mon travail est une réussite car mes débuts en France furent extrêmement difficiles ! Je me suis heurté au milieu musical parisien : dans les années 1990–2000, socialement, humainement et musicalement l’environnement était très hostile au jeune musicien outsider que j’étais. Il fallait que je trouve des musiciens qui veuillent bien jouer mes compositions... Ce ne fût d’abord possible qu’au Maghreb et, depuis 2009, au Canada.

Sinon, je regrette de ne pas savoir jouer de piano... mais je m’y suis mis il y a peu de temps !


Sur l’île déserte…

Quels disques ? Bird, Bach et Bartók,

Quels livres ? Le Cycle des robots d’Isaac Asimov.

Quels films ? Je ne regarde jamais de films !

Quelles peintures ? Tout William Turner.

Quels loisirs ? Le cyclisme.




Les projets

Mes projets sont de toujours avoir assez d’énergie et d’imagination pour continuer à jouer, composer et enregistrer.

19 mars 2020

Tempus Fugit - Caravaggio

En 2000, Benjamin de la Fuente, Samuel Sighicelli et Benjamin Dupé, trois compositeurs contemporains sortis du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, créent Sphota, une « coopérative d’invention musicale ». C’est dans le cadre ce collectif qu’en 2004, de la Fuente et Sighicelli montent Caravaggio, avec Bruno Chevillon et Eric Echampard. Leur premier opus, Caravaggio #1, sort en 2005 sur le label INA GRM, suivi de Caravaggio #2 (2012) et Turn Up (2016) chez La Buissonne et, en janvier 2020, Tempus Fugit pour Eole Records.

Tempus Fugit n’est sans doute pas une référence au « Tempus Fugit » (ou « Tempus Fugue-It ») que Bud Powell a composé en 1949, mais peut-être au morceau de Yes (Drama – 1980), voire au vaisseau de Valérian et Laureline… En tous cas la musique de Caravaggio accompagnerait parfaitement l’ambiance futuriste de la bande dessinée de Pierre Christin et Jean-Claude Mézières. Quoi qu’il en soit, cet album de Caravaggio s’intéresse au temps qui file ! Et le quartet embarque Serge Teyssot-Gay (Noir Désir, Interzone, Zone libre, Kit de Survie…) dans une étape de son périple spatio-temporel sonore (« Vers la Flamme »)…

Les six morceaux ont été composés par Caravaggio et leurs titres évoquent le cinéma (« Travelling », « 70 MM » et « Jessica Hyde », l’héroïne de la série Utopia), la chanson (« My Way »… « Winding Roads » qui rappelle « The Long and Winding Road » du disque Let It be des Beatles) et la musique classique (« Vers la flamme » est aussi le titre d’une pièce pour piano d’Alexander Scriabine).

L’écoute de Tempus Fugit plonge définitivement l’auditeur dans le septième art : les voix off, insérées ça-et-là, sont explicites. Des grésillements électriques, stridences subites, bruitages minimalistes, grondements sourds, claquements mystérieux, tintements synthétiques, nappes de sons lointaines, souffles obscures… forment des décors interstellaires (« Travelling ») ! Les rythmes électro-rock (« Vers la flamme »), ponctués de martèlements lourds, de riffs saturés, de roulements sourds et de frappes puissantes montrent qu’on ne rigole pas tous les jours dans l’espace (« Winding Roads ») ! Un leitmotiv de quatre notes (« Jessica Hyde »), quelques bribes mélodiques (« My Way ») ou une esquisse de thème (« 70 MM ») mettent des touches humaines dans cet univers cosmique. Une scène expressionniste – grondement de moteur, crissements de pneus, verre brisé, bruit de radio… – rappelle que la terre n’est pas loin (« 70 MM »)… à moins que ce soit la bande son d’un vieux polar visionné dans une navette spatiale !
Combinaison de musique concrète, d’électro et de rock progressif, Tempus Fugit a tout de la bande originale d’un de film de science-fiction : ses sonorités mystérieuses et planantes invitent au voyage dans l’espace intersidéral…

Le disque

Tempus Fugit
Caravaggio
Benjamin de la Fuente (vl, électro), Samuel Sighicelli (Kbd), Bruno Chevillon (b, électro) et Eric Echampard (d), avec Serge Teyssot-Gay (g).
Eole Records – Eor_018
Sortie le 29 janvier 2020

Liste des morceaux

01. « Jessica Hyde » (08:31).
02. « My Way (a) » (04:13
03. « My Way (b) » (06:08
04. « Winding Roads » (08:03
05. « Travelling » (05:57
06. « Vers la Flamme (a) », Caravaggio & Teyssot-Gay (03:55).
07. « Vers la Flamme (b) », Caravaggio & Teyssot-Gay (04:17).
08. « 70 MM » (08:54).

Tous les morceaux sont signés Caravaggio, sauf indication contraire.

15 mars 2020

More Conversations With The Drum – The Workshop

Entre Thôt, Morgan The Pirate, L’Orphicube, Print, Twins, le 11h11 Orchestra et ses nombreuses autres collaborations ou activités pédagogiques, Stéphane Payen construit une œuvre cohérente sous le signe du jazz et de la musique contemporaine. En 2011 le saxophoniste monte The Workshop avec Olivier Laisney à la trompette, Guillaume Ruelland à la contrebasse et Vincent Sauve à la batterie. En 2015 le quartet sort Conversation With The Drum et Music by Doug Hammond, autour de la musique du batteur. En compagnie du saxophoniste baryton Bo Van Der Werf, du guitariste Nelson Veras et du batteur Thibault Perriard, Payen et son équipe publient More Conversations With The Drum le 6 décembre 2019, toujours sur le label Onze Heures Onze.

Les huit morceaux de More Conversations With The Drum, signés Payen, sont des tributs : « Adèle » à la danseuse Virginie Cincet, au batteur Ianik Tallet et au guitariste Pierre Van Dormael ; « OND » au célèbre quartet Old and New Dreams ; « Little Thing To » à Thôt Twin ; « Nine To Hate » à la contrebassiste Sarah Murcia ; « Pe » au pianiste Benoît Delbecq ; « Lyon Part 3 » au saxophoniste Romain Dugelay… Quant à « Ornette Like », il s’agit bien entendu d’un hommage à Ornette Coleman.

Payen soigne son écriture : les thèmes sont des motifs élégants (« Adèle »), des hymnes dissonants (« Ond ») ou des mélopées sinueuses (« Nine to Hate »), quant à la plupart des développements, ils se déroulent dans un esprit de musique contemporaine, avec des mouvements à l’unisson (« Ond »), des lignes superposées (« Rebound »), des croisements de voix (« Little Thing To »), des contrepoints (« Nine to Hate »)… entre lesquels s’insèrent des chorus free mélodieux (« Ornette Like ») ou des dialogues touffus (« Pe »), portés par des chœurs subtils (« Adèle »). Ces structures sophistiquées s’appuient sur une rythmique puissante – deux batteries oblige… – qui laisse la par belle aux poly-rythmes (« Lyon Part 3 »), à des échanges de frappes denses (« Little Thing To ») ou à des crépitements sonores (« Pe »), et qui insuffle une tension (« Ond »), presque toujours entraînante (« Ornette Like »). Si More Conversations With The Drum évoque ça-et-là les abstractions paradoxalement charnelles d’Ornette Coleman, les constructions harmonico-rythmiques de Steve Coleman sont également au rendez-vous, mais la pâte de Payen se fait sentir dans la matière free et chambriste contemporaine que The Workshop sculpte tout au long de l’album.

Relevée du début à la fin, la musique de The Workshop se savoure sans modération et More Conversations With The Drum confirme l’adage qui fait du jazz la plus savante des musiques populaires et réciproquement…

Le disque

More Conversations With The Drum
The Workshop
Stéphane Payen (as), Olivier Laisney (tp), Bo Van Der Werf (bs), Nelson Veras (g), Guillaume Ruelland (b), Vincent Sauve (d) et Thibault Perriard (d).
Onze Heures Onze – ONZ036
Sortie le 6 décembre 2019

Liste des morceaux

01. « Adèle » (6:37).
02. « Rebound » (4:42).
03. « Ond » (9:04).
04. « Ornette Like » (3:14).
05. « Little Thing To » (6:57).
06. « Nine to Hate » (6:36).
07. « Pe » (4:25).
08. « Lyon Part 3 » (6:36).

Tous les morceaux sont signés Payen, sauf indication contraire.