23 décembre 2024

Martial Solal, l'incomparable...

Mes doigts sur un clavier…


Instrumentiste exceptionnel, compositeur singulier, artiste hors norme, Martial Solal a tiré sa révérence le 12 décembre 2024, après quasiment un siècle dédié à la musique. 

 

« Il y avait un piano chez nous. Un Erard droit, avec deux chandeliers fixés de part et d’autre du pupitre »

Né le 23 août 1927, fils unique d’une famille de juifs d’Afrique du Nord, Solal grandit à Alger la Blanche au milieu de sa famille maternelle. Son père est expert-comptable et sa mère est musicienne. Son loisir principal est le cinéma : « nous vivions en vase clos. L’ouverture sur le monde nous venait surtout du cinéma, notamment grâce à ce que l’on appelait les actualités. J’y allais deux fois par semaine […] J’étais fou de cinéma ».

Pendant six ans, Solal prend des cours de solfège et de piano avec madame Gharbi, qui « a  quand même réussit à me faire digérer assez rapidement la Méthode Rose ». La famille Solal écoute Radio Alger, va au Majestic, à la brasserie Tantonville, mais surtout aux Bains Nelson, où se produit « ‘le’ jazzman d’Alger, Lucky Starway », qui improvise sur des airs de variété. Solal fait une découverte fondatrice : « que des airs aussi stupides puissent devenir intéressants déclencha chez moi un étonnement incroyable. […] Un autre monde m’apparaissait. Un monde de liberté, surtout ».

Malgré les cours de Madame Gharbi, puis de sa fille Huguette, Solal rate le concours d’entrée au Conservatoire d’Alger. En 1941 Vichy décrète que les juifs d’Algérie ne sont plus Français. Solal n’a plus droit d’aller à l’école publique et ne trouve aucun intérêt dans les cours privés auxquels il est inscrit. Il les sèche et se réfugie chez une tante, voisine de Starway ! La musique sera désormais son destin. Multi-instrumentiste, mais saxophoniste avant tout, Starway partage avec Solal sa passion du jazz – Coleman Hawkins, Ben Webster – et ses influences – Fats Waller et Earl Hines. Il lui permet aussi de « monter sur la première marche » avec « Shoe Shine Boy », premier morceau joué en solo par Solal.

Sur les traces de son mentor, Solal apprend aussi le saxophone, la trompette et, surtout, la clarinette, dont il joue dans les pubs, les mess et autres réunions de sous-officiers Alliés. Mais, à peine âgé de seize ans, c’est comme pianiste que Solal commence sa carrière professionnelle dans l’orchestre de Starway. En parallèle, il se produit également au saxophone, à la clarinette et au piano, au Casino Music Hall d’Alger, accompagné par un orchestre. Solal trouve également un engagement chez Radio Alger pour jouer une fois par semaine, puis il tourne à travers l’Algérie avec la troupe de Jim Gérald. Si, à l’époque, Solal joue une musique « légère », le jazz prend une place grandissante dans sa musique grâce aux disques américains, aux films musicaux – Glenn Miller, Judy Garland… –, aux concerts retransmis à la radio – Django Reinahrdt avec Hubert Rostaing


« Entendre « Laura » joué par Don Byas […] m’avait procuré des sensations inconnues »

A dix-huit ans Solal s’éprend d’une voisine de quinze ans, mais avant de pouvoir se marier, il y a le service militaire ! Et, en 1947, Solal est incorporé à Rabat, au bureau des effectifs. Certes il reprend du service pour Radio Maroc, mais il n’apprécie pas les quinze mois passés en caserne. De retour à Alger, pour rassurer sa future belle-famille sur son statut social, Solal passe l’examen de la Sacem et devient « pianiste-compositeur ». Les jeunes mariés, installés chez la belle-famille de Solal, vivent des émoluments de l’orchestre de Starway et de quelques cours de piano.

Solal détaille ses influences : Erroll Garner pour « le léger décalage entre les deux mains », Teddy Wilson pour « la netteté de son exécution », Art Tatum pour « son  approche de l’instrument [qui] m’a paru être l’archétype de ce que je recherchais », à savoir « comment faire pour se nourrir de la musique de ceux qui vous ont marqué sans devenir leur esclave ? », Bud Powell pour « la puissance de ses attaques » et Thelonious Monk, « créateur d’un univers »… Mais Solal arrêtera d’écouter des disques à partir de 1950 car il ne veut pas prendre le risque de jouer « à la manière de », à l’exception de Charlie Parker : « je ne me suis pas privé des solos de Charlie Parker. Je ne m’en lassais pas. Mais il ne m’influençait pas directement ».

Tiraillé entre sa femme et sa mère, toutes les deux jalouses, et sans cesse obsédé par l’idée d’aller jouer du jazz à Paris depuis que Byas lui a dit qu’il pourrait y trouver du travail, Solal décide donc de partir…

« Partir était peut-être une folie. Mais rester, sûrement une erreur. J’ai préféré la folie »

En 1950, à vingt-deux ans, Solal quitte Alger et rejoint Paris, via Marseille. Mais la vie de musicien à Paris n’est pas une sinécure. Installé d’abord à Montmartre, puis près de la Bourse, Solal cherche des engagements. Son premier cachet est à Bar-le-Duc avec le jazzman Philippe Brun, mais il ne joue que des tangos, rumbas et autres valses musettes… Solal fait donc le métier et commence à se demander s’il va y arriver quand il décroche un contrat dans l’orchestre de Noël Chiboust, autre nom du jazz célèbre en France. Sa femme le rejoint et ils s’installent à République. En 1951, Solal est embauché par le chef Jamaïcain Benny Bennett et se retrouve aux côté de Pierre Michelot et Christian Bellest. Dans cet orchestre qui joue au Grand Rex, Solal peut jouer du jazz et notamment « Boplicity », qu’il a relevé de Birth of The Cool, disque emblématique de Miles Davis. Il fait ensuite partie de l’orchestre d’Aimé Barelli qui joue Chez Carrère, un restaurant de la rue Pierre-Charron, puis au Casino de Cannes. 1952 est l’année de naissance de son fils, Eric. Solal commence « à faire partie des pianistes qui comptaient » et arrive à vivre de la musique grâce à des sessions pour le cinéma, cafés-théâtres,  cabarets… Mais décidé de jouer du jazz, Solal quitte Barelli pour l’orchestre de Tony Proteau qui se produit à l’Alhambra tous les dimanches matin. Au début des années cinquante, le be-bop débarque en France et déclenche « le grand chambardement », à savoir l’affrontement historique entre les « figues moisies », défenseurs sectaires du jazz traditionnel menés par Hugues Panassié, et les « raisins aigres », partisans de cette nouvelle approche, sous l’égide d’André Hodeir. Quant à Solal, il accueille le be-bop avec enthousiasme, il considère que « le mouvement be-bop a été le tournant le plus significatif de l’histoire du jazz ».

« Le véritable improvisateur, pianiste ou pas, doit être capable de penser très vite et se jeter à l’eau constamment. Il doit, en un temps record, réfléchir, refuser, censurer, préférer et adopter. Autant de verbes qu’il doit savoir conjuguer, si possible sans faute de grammaire ».


Solal fréquente le Club Saint-Germain, inauguré en 1948, et, à force de persévérance, finit par remplacer pianiste maison, Bernard Peiffer, parti tenté sa chance aux Etats-Unis. Il y reste douze ans, jouant également, à partir de 1954, au Ringside, devenu rapidement le Blue Note. Solal se produit avec le contrebassiste Michelot et le batteur Kenny Clarke. Le trio accompagne des musiciens comme Sonny Stitt, Bobby Jaspar, Jay Jay Johnson, Lucky Thompson, Stéphane Grappelli, Jimmy Gourley, Chet Baker, Stan Getz, Lee Konitz – qui devient un ami –, Lester Young

En 1953, André Francis entend Solal et lui propose d’enregistrer un quarante-cinq
tours pour Vogue. Après Jordu, son premier disque, Solal enregistre moult disques en compagnie de Reinhardt, Astor Piazolla, André Hodeir, Ray Ventura, Michel Legrand, Claude Bolling… et même Sidney Bechet, alors que la guerre entre les « raisins aigres » et  les « figues moisies » fait rage ! « Jeune espoir », soutenu par Francis et Léon Kaba, patron de Vogue, Solal essaie de multiples combinaisons : quartette, big band, cuivres… mais les ventes de disques restent en berne. Pourtant, en 1956, Jean Cocteau remet à Solal le prix Django Reinhardt de l’Académie du Jazz, attribué au musicien français de l’année. Heureusement que les ventes des disques de Bechet font vivre Vogue ! Pour essayer de faire décoller les ventes, Rostaing et Solal tentent de suivre la trace d’Earl Bostic, qui a trouvé le succès en jouant du Rhythm and Blues. Ils se renomment Earl Cadillac et Jo Jaguar, mais l’essai n’est pas transformé…


« S’il veut parvenir au plus haut niveau, le pianiste improvisateur doit avoir à la fois le talent de ceux qui reproduisent et celui de ceux qui inventent »

C’est en 1957 que Solal monte son premier groupe, un quartet avec le trompettiste Roger Guérin, le contrebassiste Paul Rovère et le batteur Daniel Humair. Ils créent la Suite en ré bémol pour quartette de jazz qui fait dire à Solal : « à partir de ce moment, je me suis considéré comme un compositeur. Cette fameuse suite allait m’ouvrir les portes de la musique de film ». Quand Jean-Pierre Melville entend la Suite, il propose à Solal de composer un morceau pour une séquence de Deux hommes dans Manhattan (1959), que Christian Chevalier, malade, n’a pas eu le temps d’illustrer. C’est le début de la carrière de Solal pour le cinéma : Jean-Luc Godard, proche de Melville, demande à Solal de composer la musique d’A bout de souffle (1960). Suivront d’autres collaborations avec Melville, mais aussi avec Henri Verneuil, Jean Becker, Edouard Molinaro, Marcel Carné… Mais, au début des années soixante-dix, le jazz comme musique de film est passé de mode et il faudra attendre une trentaine d’années pour que Solal soit de nouveau sollicité, par Bertrand Blier, pour son film Les Acteurs.

« une partie [du] public a pris la fâcheuse habitude d’écouter… avec ses yeux davantage qu’avec ses oreilles »

Après huit ans chez Vogue, Solal rejoint Pathé-Marconi, où le succès discographique n’est toujours pas au rendez-vous.  En 1962, Guy Lafitte et Solal vont composer « Je préfère le twist » qui « n’a intéressé personne. « Twist à Saint-Tropez », par contre, a été un triomphe. Qui continue encore quarante ans après. C’est plutôt désespérant ! »… A partir de 1959, le quartet de Solal, devenu trio avec Humair et Guy Pedersen à la contrebasse, rencontre un certain succès. En 1963, après avoir enregistré trois disques, le trio se sépare parce que Solal a décroché un contrat aux Etats-Unis et que Pedersen et Humair ont rejoint les Swingle Singers. George Wein entend la version de « Jordu » enregistrée par Solal et, conquis, il l’invite pour jouer deux semaines à l’Hickory House, club de Manhattan, et au festival de Newport. Séparé de sa première femme, Solal s’est remarié et le couple s’embarque pour New York sur le paquebot France. A New York, Solal se produit avec Teddy Kotick à la contrebasse et Paul Motian à la batterie. Après Newport, il prolonge son séjour newyorkais et se reproduit à l’Hickory House, puis au Festival de Montréal. Mais l’éloignement de son fils, l’absence de sa famille et le mal du pays lui font renoncer à une carrière américaine. Certes, Solal rejouera à San Francisco, Broadway, Chicago, Monterey… mais sa carrière est définitivement relocalisée en France.  

De retour à Paris en 1964, Solal ne rencontre pas le succès escompté et vit de ses droits, de l’enseignement, de concerts dans les clubs… Côté vie privée, il est séparé de sa deuxième femme et, en 1968, il rencontre Anna. Le couple s’installe à Boulogne-Billancourt et sa fille Claudia naît en 1971. A la mort du père de Solal, sa mère vient vivre chez eux, pendant une vingtaine d’années. La famille s’installe ensuite à Bougival, puis à Chatou, dans une maison qu’ils retapent et où ils vivront le reste de leur vie.

« J’aurais passé ma vie à apprendre »

En 1974, Hans Brunner-Schwer engage Solal chez MPS. La bonne étoile est de retour. En 1980, sous l’impulsion de Jean-Louis Chautemps, Solal monte le Dodecaband qui rencontre un franc succès. Ce big band évoluera jusqu’à devenir le Newdecaband en 2002. La notoriété de ce grand orchestre dépasse le milieu du jazz et ouvre à Solal les portes de la musique classique : il est programmé au festival des Arcs par Yves Petit-Devoize, joue les concertos de Bach pour deux, trois ou quatre pianos, compose des pièces pour des ensembles de musique contemporaine, dont Echanges, un mini-concerto pour piano et orchestre de chambre commandé par Daniel Tosi. En 1977, Marius Constant et Solal composent Stress, une pièce pour trio de jazz, avec Césarius Alvim et Humair, et le quintette de cuivres Ars Nova. En 1980, à la demande de Francis, Solal écrit un concerto pour piano et orchestre, enregistré pour Erato par l’orchestre de Monte-Carlo sous la direction de Constant. En 1990, Solal produit Nuit étoilée, un concerto pour piano, synthétiseur et piano désaccordé, commandé par René Martin pour le festival de La Roque-d’Anthéron. Par ailleurs, en 1989, la Ville de Paris crée le concours de piano Martial Solal. Consécration pour un pianiste-compositeur exceptionnel.

A partir des années quatre-vingt dix, outre les Dodécaband et Newdecaband, Solal anime une émission hebdomadaire consacrée au piano jazz sur France Musique, retourne jouer aux Etats-Unis, continue de composer des concertos – Coexistence en 1997, Concerto pour saxophone en 2014 –, des pièces pour pianos – Petit exercice pour cent doigts en 2009, Works for Piano and Two Pianos en 2015… En 2018, Solal met un point final à sa carrière avec My One and Only Love, enregistré en solo, et deux derniers concerts, à Munich en 2018 et à la Salle Gaveau en 2019.

Laissons à Solal le dernier mot sur la musique : cet « ensemble des bruit imaginés avant même la naissance du premier musicien, ayant pour principal objectif d’adoucir les mœurs ».

 

Sources :

  • Ma vie sur un tabouret – Martial Solal – Acte Sud – 2008
  • Wikipedia 
  • Discogs

 


Martial Solal en musique


Un hommage à Martial Solal à partir de quelques morceaux piochés au hasard des disques de la musicothèque…


« Suite en ré bémol, pour quartette de jazz »
Martial Solal « Live » 1959 / 85
1985

« Je regrette d’avoir fait si peu de disques en public : je m’y sens beaucoup plus stimulé qu’en studio. Le concert me force vraiment à donner le meilleur de moi-même ». Pour combler un vide, Nicolas Brasart réalise ce coffret de quatre vinyles en 1985, compilation de vingt-trois morceaux tirés des archives de Radio-France, de l’I.N.A. ou autres, qui regroupe douze titres inédits à l’époque. Avec des commentaires de Solal pour chaque morceau, le livret est instructif et passionnant. Les prises proviennent aussi bien de l’O.R.T.F – les fameux studios 104 et 105 – que de festivals – La Défense, Grande Parade du Jazz, Juan-les-Pins, Les Arcs – ou de concerts dans diverses clubs et salles – Club Saint-Germain, Salle Wagram, Théâtre de la Ville, Le Capitole etc. Côté musiciens, l’auditeur croise les inévitables Guérin, Pedersen, Rovère, Alvim, Bellonzi et Humair, mais aussi Didier Lockwood, Grappelli, Konitz, Chautemps, Niels Henning Ørsted-Pedersen, John Lewis et le Big Band de la BRT.

La « Suite en ré bémol, pour quartette de jazz », enregistrée en septembre 1959 à la R.T.F. ouvre le coffret. Solal y est accompagné de Guérin à la trompette, Rovère à la contrebasse et Humair à la batterie. La suite alterne mouvements bondissants, portés par une walking et un chabada véloces, des passages bluesy, des échanges malicieux, le tout parsemé d’un humour piquant. Les accélérations et décélérations de tempo, les variations rythmiques, tantôt be-bop, blues ou valse, et les constructions à base d’unissons vifs, de contrepoints ludiques ou de questions-réponses impromptues… font sonner le quartette comme un véritable orchestre !

« Pour moi, cette suite reste l’une des choses importantes de ma vie. Je l’ai composée pendant plusieurs mois. J’écrivais les premières mesures et nous les jouions. Puis le lendemain j’écrivais la suite ; je l’ai allongée jusqu’au moment où j’ai estimé que l’œuvre était complète ».


« Solar »
Duo In Paris
1975

En octobre 1975, lors du premier Festival Indépendant de Massy, créé par Gérard Terrones et Raymond Boni, Solal se produit en duo avec Joachim Kühn. Le disque comprend trois morceaux : « Solar » de Miles Davis et deux morceaux improvisés par le duo : « Journey Around the Word » et « Musica 2000 ».

« Solar » foisonne : un déluge de notes, avec des lignes arpégées à profusion et des développements crépitants, qui s’appuient sur des accompagnements touffus, à grand renfort d’accords, de riffs, d’ostinatos, de pédales… Les solistes tournent autour du thème, avec des idées plus innovantes les unes que les autres, sans se laisser souffler.

Stimulés l’un par l’autre, Solal et Kühn proposent des échanges magnifiques et rivalisent d’ingéniosité.


« Cherokee »
Suite for Trio
1978

En 1978, Solal sort Suite For Trio chez MPS Records, le label de Brunner-Schwer. Il est accompagné d'Ørsted Pedersen à la contrebasse et Humair à la batterie. Le disque s’articule autour de trois compositions de Solal, dont la suite éponyme, de « ‘S Wonderful », le tube de George et Ira Gershwin (1927), de « Cherokee » saucisson be-bop signé Ray Noble, et d’« Here’s That Rainy Day » écrit par Jimmy Van Heusen et Johnny Burke en 1953.

« Cherokee », connu aussi sous le titre « Indian Love Song », est l’un des thèmes de prédilection de Parker, musicien que Solal apprécie énormément. Le saxophoniste a joué et rejoué ce morceau, mais aussi utilisé sa grille pour créer de nouveaux morceaux, tels que « Ko-Ko », « Warming Up a Riff », « Home Cookin’ll »…

Après une introduction mélodieuse et rapide de NHOP, soutenue par les cymbales subtiles d’Humair, puis un chorus tonique de la batterie, épaulé par une walking bass inébranlable, Solal arrive en douceur, avec un décalage des mains du plus bel effet. Mais le calme « martialien » précède toujours la tempête « solalienne », et le pianiste se lance dans des variations ébouriffantes, soutenues par une running bass et un chabada de compétition.

Un disque ancré dans l’esthétique be-bop avec des ambiances tendues et énergiques.
 

« Aigue Marine »
The Solosolal
1979

Publié par MPS en 1979, The Solosolal est disque en solo de Solal (!), qui compte sept morceaux. Six standards - « I’ll Remember April », « Tangerine », « Tune Up », « Poinciana », « Stompin » At The Savoy » et « Lover Come Back To Me » - et « Aigue Marine », seule pièce du disque composée par Solal.

Morceau tranquille, une fois n’est pas coutume, « Aigue Marine » commence dans une ambiance quasi Debussyste, mais saupoudrée de syncopes et accents qui trahissent ses origines jazz… La main droite déambule en souplesse tandis que la gauche alterne pompes légères, lignes arpégées et phrase décalées.  

Dans The Solosolal, Solal propose une musique personnelle, sorte de be-bop aux couleurs contemporaines, dans laquelle les idées fusent en toute maîtrise.


« L’allée Thiers et le poteau laid »
Solal Lockwood
1993

Solal et Lockwood avaient eu l’occasion de jouer en duo à La Défense en 1981. Mais cet opus est le premier qu’ils ont enregistré ensemble, en 1993. Au programme, trois morceaux signés Solal, trois de la plume de Lockwood et quatre standards : « Solar » de Davis, « All The Things You Are » de Jerome Kern et Oscar Hammerstein, « Nuages » de Reinhardt et « Someday My Prince Will Come » de Frank Churchill.

Toujours avide de jeux de mots, Solal compose « L’allée Thiers et le poteau laid »… Après un démarrage abrupt et puissant à l’unisson, le violon et le piano brodent en contrepoints des phrases enluminées. Le piano saute d’un contre-chant espiègles à une ligne de basse entraînante, tandis que le violon passe d’une envolée lyrique à un staccato rythmique. Les deux musiciens s’amusent...

L’écoute du disque transmet une joie de jouer contagieuse !

 

« Summertime »
Just Friends
1997

En 1997, Yves Chamberland produit Just Friends pour Dreyfus Jazz. Solal est entouré d’une rythmique de luxe : Gary Peacock à la contrebasse et Motian à la batterie. Comme le dit le pianiste : « avec Paul et Gary, j’ai l’impression d’être au volant d’un bolide parfaitement rôdé ».

Au programme de Just Friends, quatre morceaux signés Solal et cinq standards, dont « Summertime », des Gershwin. A son habitude, Solal déconstruit rapidement le thème avant de le développer dans un esprit bop pris à la lettre, ponctué d’arabesques, souligné par une walking bass grondante et un chabada léger. Après un chorus a capela mélodieux de Peacock, juste ponctué par la charleston, le trio revient au thème.

Walking bass ample et imperturbable de Peacock, chabada flexible de Motian et virevoltes de Solal : Just Friends s’inscrit dans une lignée néo-bop moderne.

 

« Brazil »
Jazz ‘n (E)Motion
1998

Solal reprend en solo treize musiques de films, dont deux des siennes : « A bout de souffle » et « Hommage à Tex Avery ». Les onze autres vont de « Que reste-t-il de nos amours » de Charles Trenet et Léo Chauillac, utilisé par François Truffaut dans Baisers Volés (1968) à « Carioca », de Vincent Youmans, Gus Kahn et Edward Eliscu pour Flying Down To Rio de Thornton Freeland (1933), en passant par « J’attendrai » (Une belle fille comme moi – Truffaut – 1972), « « Maria » (West Side StoryRobert Wise – 1961), « Have You Met Miss Jones » (Gentlemen Marry BrunettesRichard Sale – 1955) etc.

« Brazil », signé Ary Barroso, a été composé pour le film éponyme de Terry Gilliam, sorti en 1986. Solal magnifie d’abord la mélodie en l’exposant à la main droite avec résonance. Le développement est d’une abstraction élégante avec des lignes cristallines qui côtoient des envolées pleine de swing et, toujours, quelques touches d’humour glissées avec malice au milieu des discours.

Dans Jazz ‘n (E)Motion, les doigts et l’esprit de Solal sont sans cesse aux aguets, et les notes fusent dans un feu d’artifice continu d’idées palpitantes.


« In a Sentimental Mood »
Martial Solal Dodecaband Plays Ellington
2000

En 1994, à l’occasion du festival Banlieues Bleues, Solal monte un big band pour interpréter des œuvres de Duke Ellington. Le disque, enregistré en 1997, sort en 2000 sur le label CamJazz. Solal a inscrit au répertoire « Satin Doll », « Caravan », « In a Sentimental Mood », « It Don’t Mean a Thing », « Take the « A » Train » et un Medley qui reprend huit morceaux d’Ellington.

Grand classique ellingtonien, « In a Sentimental Mood » revisité par Solal donne une nouvelle définition du sentimentalisme... Le morceau juxtapose des unissons orchestraux puissants et des questions-réponses fiévreuses, au milieu desquels les solistes intercalent des bouts de thème et des variations, soutenus par une rythmique pleine de swing, le tout d'une humeur plus fantasque que sentimentale.

A l’instar d’Exposition sans tableau du Martial Solal New Decaband, sorti en 2006, Martial Solal Dodecaband plays Ellington pétille d’intelligence et la relecture de l’œuvre du Duke par Solal est plus que convaincante.


« Fast Ballad »
Rue de Seine
2006

Sorti en 2006 chez CamJazz, Rue de Seine est un disque en duo entre Solal et le trompettiste Dave Douglas. Les deux musiciens amènent trois compositions chacun et les quatre autres sont des standards : « Have You Met Miss Jones », « Body and Soul », « Here’s That Rainy Day » et « All the Things You Are ».

« Fast Ballad » est un morceau signé Solal. Le morceau porte bien son titre humoristique et reflète bien la patte solalienne. Il met regard des phrases nerveuses jouées à l’unisson et des dialogues plus tranquilles, jouées en contre-chant, avant que le piano ne s’évade dans un chorus tout en zigzags.

Dans Rue de Seine, les échanges avec Douglas, volontiers impétueux, souvent imprévisibles, toujours malins et truffés d’humour prouvent une fois de plus que Solal brille dans l’exercice délicat du duo.

 
Plus de chroniques...
 
 23 janvier 2014
Auditorium Jean-Pierre Miquel – Vincennes
Martial Solal & Bernard Lubat
 
  
 
Exposition sans tableau
Martial Solal Newdecaband
Martial Solal (p), Claude Egea et Eric Le Lann (tp), Lionel Surin (cor), Claudia Solal (voc), Denis Leloup et Marc Roger (tb), François Thuilliez (tu), Thomas Grimmonprez (perc), Jean-Philippe Morel (el b, b).
Label / Distribution : Nocturne 
2007

Amateurs de lignes droites férus de continuité, passionnés de chansons « relax »… passez votre chemin : Exposition sans tableau n’est pas fait pour vous ! L’incorrigible Martial Solal a sorti une fois de plus un disque « solalien » pur jus. C’est-à-dire une musique qui file à cent à l’heure, toute en zigzags, brisures, ruptures, ricochets, rebonds… Une vraie balle de flipper ! Une musique faite d’imprévus qui maintiennent l’auditeur sous tension du début à la fin. Impossible de rester tranquille ! Une musique où les détails pullulent : clins d’œil espiègles, dialogues sur chœurs, brouhahas structurés… Une musique maligne, sérieuse dans la parodie, un peu à la Buster Keaton. D’ailleurs, comme Solal cherche à présenter une idée sous tous ses angles, sa musique devient très vite cinématographique, avec gros plans, travellings, contre-champs, panoramiques, contre-plongées… autour d’un thème central.

En plus du complice de toujours, Eric Le Lann, et de Denis Leloup qui jouait déjà dans le Dodecaband, Solal a fait appel à une nouvelle vague de musiciens. Il double la trompette de Le Lann par celle de Claude Egea et le trombone de Leloup par celui de Marc Roger. Pas de saxophone dans ce combo, mais le cor de Lionel Surin et le tuba de François Thuilliez. « A Frail Dance » est le seul morceau où Claudia Solal chante un texte - sur les autres, sa voix est utilisée en section avec les soufflants. Les percussions ont été confiées à l’excellent et omniprésent Thomas Grimmonprez. Enfin, c’est Jean-Philippe Morel qui tient la basse, parfois électrique et « dans le vent » – preuve que Solal est à l’écoute du présent.
 
Titre du disque oblige, on ne peut éviter d’évoquer Les Tableaux d’une exposition. Evidemment, la comparaison peut paraître osée, voire oiseuse, car les genres sont différents, mais le jeu des similitudes est amusant. Côté musique (dans la version de Ravel), nous pourrions évoquer le rôle de la trompette, à qui revient l’entame des deux suites, l’apothéose de « La grande porte de Kiev » qui trouve son pendant dans le bluesy « Lamblike », le foisonnement instrumental, les changements mélodico-rythmiques brutaux etc. mais tout cela est tiré par les cheveux…
 
Côté contexte, une première coïncidence est anecdotique : Moussorgski a écrit ses Tableaux en 1874… juste un siècle avant la mort de Duke Ellington, présent en filigrane dans la plupart des œuvres pour orchestre de Solal, y compris, bien sûr, dans l’Exposition. A la base, les Tableaux sont écrits pour piano, l’instrument de Martial, mais sont davantage écoutés dans leurs versions pour orchestre, l’instrument de Solal. A ce titre, dans l’Exposition, nous trouvons également cette dualité entre piano soliste et piano orchestre : Martial Solal ne cesse d’aller et venir entre l’orchestre et la section rythmique. A l’instar des Tableaux, l’Exposition peut aussi s’écouter comme une suite de 43’40 tant la cohérence est grande d’une plage à l’autre - écouter un morceau séparément de l’album lui fait sans doute perdre du sens. Mais là où Moussorgski avait intercalé cinq « Promenades », l’Exposition de Solal n’est qu’une promenade en six mouvements puisqu’il n’y a pas de tableaux ! Sinon, Moussorgski semble aimer les titres bouffons : le « Ballet des petits poussins dans leurs coques » ou « La cabane de Baba Yaga sur des pattes de poule ». Et même s’il s’est retenu dans l’Exposition, ces titres pourraient être de Solal !

Reste à souligner l’excellent texte de la pochette signé Arnaud Merlin, qui décrit brièvement la démarche de Solal, l’ambiance de chaque morceau et le rôle des solistes. C’est clair et convaincant comme la musique du « Maître ».

A près de quatre-vingts ans, Solal montre avec brio qu’il n’a rien perdu de sa verve, ni de sa créativité musicale, et nous ne pouvons que constater avec Xavier Prévost qu’il est « un grand musicien, dont l’importance excède largement les frontières de l’Europe – et celles du jazz. » [*]

Liste des morceaux
 
    1. « Incoercible » (7’21).
    2. « Western » (7’11).
    3. « A Frail Dance », texte de Claudia Solal (9’59).
    4. « Cortancyl » (6’05).
    5. « Exposition sans tableau » (6’36).
    6. « Lamblike » (6’24).

Toutes les compositions sont signées Martial Solal.
 
[*] Dictionnaire du jazz – Collection Bouquins – Robert Laffont.
 
Publié le 16 avril 2007 dans Citizen Jazz

 
Rue de Seine
Martial Solal (p), Dave Douglas (tp)
2006
 
Martial Solal aime les aventures musicales en solo, duo, trio…. et plus. Ce qui lui faut, c’est l’inouï musical. Et question trompette, tout habitué pense immédiatement à Portrait In Black And White avec Eric Le Lann, complice de toujours. Pourtant, en 2006, Solal s’est associé à un bagarreur des portées pour un duo pas comme les autres : Dave Douglas. Trompettiste que l’on ne présente plus, ce dernier a une conception de la création musicale proche de celle du plus célèbre pianiste français : liberté, musicalité, humour.
 
Rue de Seine commence par six thèmes écrits par chacun et se conclut sur quatre standards parmi les plus joués. Programme amusant pour un disque qui permet d’apprécier le duo dans des contextes variés. Douglas n’est pas Le Lann et réciproquement. Donc Rue de Seine n’est pas dans le même registre que Portrait In Black And White. Et pourtant : qui brette avec Solal a du mal à tenir sa garde et se laisse vite emporter par l’esprit du pianiste… 

Le duo se trouve vite et la musique virevolte : contrepoints et unissons dans les expositions, majesté et espiègleries dans les variations, questions-réponses dans les conclusions. Égal à lui-même, Solal est un maître de la ponctuation : son texte musical est rempli d’une ribambelle de points, virgules, points-virgules, interrogations, exclamations… qui donne une présence rythmique savoureuse à son style. Il n’en finit pas de rebondir, à la manière d’un dessin animé de Tex Avery ! Douglas n’est pas en reste et se prête parfaitement au jeu de Solal. Il met en relief sa belle sonorité à la fois puissante et claire, s’amuse avec les thèmes, ricoche sur les propos de son comparse, et parsème son discours de phrases émouvantes (« Blues To Steve Lacy »). Il n’est pas étonnant qu’une rue qui fut choisie par d’Artagnan, George Sand, Baudelaire et bien d’autres soit une source d’inspiration… Et Rue sur Seine en est une preuve infaillible.

Liste des morceaux
 
    1. « July Shower », M. Solal (5’24).
    2. « Blues To Steve Lacy », D. Douglas (5’54).
    3. « 34 Bars Blues », M. Solal (5’10).
    4. « For Suzannah », D. Douglas (3’25).
    5. « Fast Ballad », M. Solal (3’43).
    6. « Elk’s Club », D. Douglas (5’06).
    7. « Have You Met Miss Jones », L. Hart & R. Rodgers (4’26).
    8. « Body And Soul », J. W. Green & E. Heyman (5’18).
    9. « Here’s That Rainy Day », J. Burke & J. Van Heusen (3’18).
    10. « All The Things You Are », O. Hammerstein & J. Kern (6’35).
 
Publié le 28 mars 2008 dans Citizen Jazz
 

15 décembre 2024

Prismes à l’eau au Triton

Le 29 novembre 2024 Daniel Humair fête Prismes à l’eau au Triton. Le disque est sorti sur le label du club le 8 novembre 2024. Le batteur est entouré du trio avec qui il joue désormais depuis sept ans (Modern Art, Drum Thing) : Vincent Lê Quang aux saxophones ténor et soprano, et Stéphane Kerecki à la contrebasse. Ils ont invité le tromboniste Samuel Blaser, compatriote d’Humair et membre de son trio Helveticus depuis 2018 (Our Way).
 
Le Triton affiche complet ! Cinq des neuf thèmes proviennent du répertoire de Prismes à l’eau et les quatre autres sont tirés de projets plus anciens : « Jim Dine » repris de Modern Art (2017), « More Tuna », composé en 1998 par Joachim Kühn pour Triple Entente, leur trio avec Jean-François Jenny-Clark, « Mutinerie », signée Michel Portal et souvent interprétée par Humair (Liberté Surveillé en 2001, Seasoning en 2017 et Drum Thing en 2020), et « Genevamalgame », une composition d’Humair jouée d’abord en 2004 à Jazz à la Vilette, puis enregistrée dans Our Way (2024).

Après une introduction plaintive, « Jim Dine » est exposé à l’unisson sur une rythmique luxuriante, entrecoupé d’un intermède bluesy. Le trombone bouché, particulièrement expressif, dialogue avec la batterie et la contrebasse, tandis que le saxophone ténor alterne phrases bop et traits free. Construit sur une structure thème – solos – thèmes classique, « Jim Dine » est riche en événements... Lê Quang lance « More Tuna » a capela, avant de développer le thème avec vivacité, en compagnie de Blaser. Les échanges, intenses, s’appuient d’abord sur une batterie puissante et une contrebasse lancinante. Une walking et un chabada véloces ouvrent ensuite la voie au saxophone ténor pour prendre un solo dans l’esprit de Sonny Rollins, et au trombone pour broder dans une veine hard-bop. Composé par Kühn, « Salinas » évoque la musique de chambre : un thème énigmatique et entraînant, des questions-réponses élégantes, une rythmique expressive qui débouche sur une walking et un chabada ponctué de rim shot, et des chorus mélodieux, notamment celui de Kerecki, ample et musical. Comme l’explique Humair en s’amusant, « Give Me Eleven », coécrit avec Kühn, « est à onze temps… c’est à dire douze temps moins les taxes ! ». Le morceau balance du début à la fin. Après le thème, une complainte criarde, les tableaux s’enchaînent, d’abord des contrepoints de Lê Quang et Blaser, suivis d’envolées démonstratives et débridées du trombone sur des changements de tempo. Le chorus a capela du ténor, entre bop et free contrôlé, bientôt enveloppé par une rythmique dense, précède une conclusion bluesy. Humair annonce « Mutinerie » avec des roulements vigoureux et une charleston régulière. Le saxophone soprano, le trombone et la contrebasse embrayent à l’unisson. La mélodie, « ethnique », donne lieu à des variations intenses et compactes, avant que le décor ne change. Kerecki prend un solo monumental, accompagné par les balais subtils d’Humair. Joueur, Blaser les rejoint avec sa sourdine wah-wah. S’engage alors une course-poursuite entre walking et chabada virtuoses et trombone, qui alterne nonchalance et vivacité. Les volutes du soprano, accompagnées des roulements de la batterie et d’un ostinato de la contrebasse, replantent un décor ethnique. 
 
Daniel Humair, Vincent Lê Quang, Samuel Blaser & Stéphane Kerecki – Le Triton – Novembre 2024 © PLM

« Cavatina », composée par Stanley Myers pour la bande-son de Voyage au bout de l’enfer, film de Michael Cimino sorti en 1978, est une ballade tranquille et lyrique qui donne l’occasion au quartet de croiser leurs voix en toute quiétude. Après cet épisode calme, la tempête « Genevamalgame » emporte le saxophone ténor dans un tourbillon vif et bondissant, la contrebasse et la batterie dans une walking et chabada effrénés, et le trombone dans une tirade dynamique, avant la conclusion sur des riffs et autres caquètements facétieux. « Missing A Page », encore une pièce de Kühn, alterne unissons abrupts et discours étirés. Lê Quang part ensuite dans un duo ébouriffant avec Kerecki, à partir duquel la section rythmique relance une walking et un chabada déchaînés. Blaser et Humair poursuivent avec un duo en suspension qui aboutit à un climat bluesy, rapidement transformé en maelström free ! Les tableaux se suivent, mais ne se ressemblent pas ! Le concert s’achève sur un morceau composé par Humair et Lê Quang dans le TGV : « Abstract Bass Bone ». D’un thème-riff dansant surgit un mouvement d’ensemble touffu, porté par une rythmique violente et profonde, entre fanfare néo-orléanaise et hard-bop épais.

Le trio plus un propose un jazz franco-suisse énergique, piquant, malicieux, volubile... et savoureux comme un banquet de fondue et de poule au pot !
 

Le disque


Prismes à l’eau
Daniel Humair

Vincent Lê Quang (ts, ss), Stéphane Kerecki (b) et Daniel Humair (d), avec Samuel Blaser (tb).
Le Triton – TRI-24579
Sortie le 8 novembre 2024

Liste des morceaux

01. « New (amuse-bouche) », Stéphane Kerecki (00:48).
02. « For Flying Out Proud », Franco Ambrosetti (03:07).
03. « Lyria Inn », Daniel Humair & Vincent Lê Quang (04:03).
04. « Free 1 », (01:46).
05. « Give Me Eleven », Danie l Humair (05:16).
06. « Abstract Bass Bone » Daniel Humair et Vincent Lê Quang (03:29).
07. « Cavatine », Stanley Myers, (04:08).
08. « Free 2 « Dark Choc" », Daniel Blaser, et Vincent Lê Quang (06:13    
09. « Salinas », Joachim Khühn (03:23).
10. « Missing a Page », Joachim Khu (04:55).
11. « Drama Drome », Daniel Humair (04.26).
12. « Saint-Cyn-CYR », Stéphane Kerecji (03:18).
13. « Triple Hip Trip », Daniel Humair (04:14).
14. « New (Pousse-Café) », Stéphane Kerecki (00:52).

01 décembre 2024

A Confused World – Philippe El Hage & Youssef Hbeisch

Après ses études musicales au Liban, puis dans les conservatoires de Boulogne-Billancourt, Rueil-Malmaison et Ivry-sur-Seine, le pianiste Philippe El Hage enregistre Byblos, son premier disque, en 2007. Suivront, en 2011, Flying With Elephants, avec des formations à géométrie variable, puis, en 2013, Asrar, en duo avec le percussionniste Youssef Hbeisch et, en 2021, Sound Of Hope en trio avec Hbeisch et le saxophoniste Damien Hennicker. Retour au duo piano – percussion pour A Confused World, qui sort le 1er novembre 2024 sur le label MEI, qu’El Hage a créé en 2014 à Dubaï, en même temps que le Musical Expression Institute, une école de musique et un studio d’enregistrement.


Les dix compositions du disques, signées El Hage, sont inédites sauf « Flying With Elephants », tirée du disque éponyme. El Hage affectionne les jolies mélodies (« A Full Moon », « Into The Unknown ») teintées de couleurs moyen-orientales (« Prelude To The Elephants »), aux contours romantiques (« Melody Fom Another World ») et solennels (« Flying With Elephants »), ou construits autour de thèmes-riffs sautillants (« A Confused World »), joyeux (« Hayat ») et dansants (« Until We Meet Again »). Le plus souvent bâtis sur une structure thème – développement – thème, les morceaux sont tour à tour vigoureux (« A Confused World »), théâtraux (« Melody From Another World »), cinégéniques (« Into The Unknown »), mélodieux (« Until We Meet Again ») et toujours marqués par la musique orientale (« Flying With Elephants »). La place du rythme est centrale, que ce soit par les lignes de basse (« A Full Moon »), riffs (« Melody From Another World ») et autres ostinatos (« Hayat ») joués à la main gauche par El Hage, ou par le foisonnement (« A New Beginning »), cliquetis (« A Full Moon »), frappes vivifiantes (« Hayat ») et poly-rythmes irrésistibles (« Until We Meet Again ») des percussions d’Hbeisch. Le piano, souvent nerveux (« A Confused World »), intègre moult ornements (« Melody For Another World ») pour apporter des saveurs orientales, de passages harmoniques arabo-andaloux (« A Full Moon ») aux appogiatures (« A New Beginning ») en passant par des trilles (« Hayat »), mordants (« A New Beginning »), sonorité de qanoun (« Prelude To The Unknown »)...

A Confused World selon El Hage et Hbeisch n’est pas aussi confus qu’il n’y paraît et l’atmosphère entraînante et dépaysante qui s’en dégage met plutôt du baume aux esgourdes !

Le disque

A Confused World

Philippe El Hage & Youssef Hbeisch

Philippe El Hage (p, b, synth) et Youssef Hbeisch (perc).
MEI
Sortie le 1er novembre 2024

Liste des morceaux

01. « A Confused World » (3:51).
02. « A Full Moon » (3:14).
03. « Melody From Another World » (3:14).
04. « Prelude To The Unknown » (2:42).
05. « Into The Unknown » (3:38).
06. « Hayat (Life) » (4:10).
07. « A New Beginning » (2:50).
08. « Prelude To The Elephants » (2:24).
09. « Until We Meet Again » (4:53).
10. « Flying With Elephants » (6:00).

Tous les morceaux sont signés El Hage.