Que ce soit avec le Tarkovsky Quartet
ou l’Yves Rousseau 4tet, Jean-Marc Larché promène ses saxophones dans des
projets qui flirtent avec la musique contemporaine…
La musique
J’ai une
dizaine d’années. Mes voisins sont musiciens amateurs, passionnés de jazz New-Orleans.
C’est l’été, cette musique qui s’échappe par toutes les fenêtres de leur grande
maison me subjugue. Attrait irrésistible qui motive notre inscription, mon
frère et moi, à l’école de la fanfare municipale.
Après une
année de solfège, je choisis la clarinette, mais aucune n’est libre. Mon frère,
qui a découvert le saxophone sur une photo du dictionnaire, a plus de chance...
Son instrument, pourtant vétuste, me séduit immédiatement. Je me mets à en
jouer passionnément, du matin au soir ! Tant et si bien que lorsqu’une
clarinette est enfin disponible, on conseille à mon frère de la prendre et de
me laisser le saxophone…
A douze ans, je
fais donc partie de la fanfare municipale de Baume les Dames et, à seize ans, je
m’inscris au Conservatoire National de Région de Besançon. A vingt-et-un ans je
suis admis au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, dont je sors
à deux ans plus tard ans avec un premier prix de saxophone. Parallèlement à ces
études exclusivement classiques, j’ai toujours pratiqué le jazz et
l’improvisation, en dehors (et quelquefois en cachette !) des institutions...
Au début je
joue du jazz de façon très empirique avec mes voisins qui ont accepté le débutant
que je suis. Nous jouons du New-Orleans et du middle jazz et improvisons
d’oreille. En arrivant à Besançon, je rencontre le guitariste Patrice Thomas. Il m’ouvre à d’autres
courants du jazz, plus modernes, et me fait partager ses connaissances
harmoniques. Très vite, la pénurie de musiciens à Besançon nous a poussés vers
la capitale pour monter nos premiers projets professionnels. C’est à ce
moment-là que je rencontre, entre autres, les frères Méchali, Martial Solal, Michel Edelin et, un peu plus tard, François Couturier.
A cette
époque, peu après le CNSM, dont l’enseignement ne m’a pas laissé que de bons
souvenirs, je suis en pleine recherche d’un son et d’un phrasé délibérément
opposés aux attentes du conservatoire… François me fait prendre conscience que
mon expérience, assez originale pour l’époque, est bien plus une richesse qu’un
fardeau et que je ne dois pas la renier. Il fut dire qu’à l’alto, je suis un
peu prisonnier des modèles inaccessibles que j’ai tellement écoutés et imités. La
découverte du soprano m’ouvre l’horizon et me tend une page presque vierge…
Cinq clés pour le jazz
Qu’est-ce que le jazz ?
Une musique conviviale et
fédératrice, une musique qui s’ouvre à toutes les musiques, se nourrit de
toutes les musiques…
Pourquoi la passion du jazz ?
Parce que le jazz est multiple et protéiforme.
Où écouter du jazz ? Ecoute-le les yeux fermés, sans rien
faire d’autre... À la maison ou en concert, ce qui compte, c’est la
disponibilité, la concentration et / ou l’abandon. Peu de gens écoutent
vraiment…
Comment découvrir le jazz ?
Se laisser guider par un(e)
passionné(e) généreux(se) qui a l’esprit ouvert…
Une anecdote autour du jazz ?
Après avoir terminé sa première
méthode de saxophone, faute d’avoir une autre, Charlie Parker la rejoue… à l’envers !
Le portrait chinois
Si j’étais un
animal, je serais un âne : curieux et réfléchi, attentif et décidé, attachant
et fiable…
Si j’étais
une fleur, je serais trop éphémère…
Si j’étais un
fruit, je serais de mon verger : une pomme de variété « grougnot », délicieuse
et peu sensible aux maladies – rustique et sophistiquée – et de très bonne conservation !
Si j’étais
une boisson, je serais forte et qui se bonifie avec le temps : un alcool de
prune (distillation maison !).
Si j’étais un
plat, je serais typé,
régional ou exotique (ce qui revient au même).
Si j’étais
une lettre, je serais A comme Anne ou, encore, Âne…
Si j’étais un
mot, je serais silence pour sa sonorité et pour ce qu’il représente : un écrin
rare et précieux qui rend possible la musique…
Si j’étais un
chiffre, je serais plutôt un nombre : 1,618, le nombre d’or. Un nombre
irrationnel pour une proportion idéal…
Si j’étais
une couleur, je serais terre de sienne : j’adore la toscane !,
Si j’étais
une note, je serais haut perchée, donc, plutôt aigu…
Les bonheurs et regrets
musicaux
Que du
bonheur : Music For A While, enregistré
pour Emouvance, avec François Couturier et Jean-Louis
Matinier.
Sur l’île déserte…
Quels disques ? Les Cantates pour alto de Jean-Sébastien
Bach par Andreas Scholl et Philippe Herreweghe, les Psaumes pour la repentance d’Alfred Schnittke par Tonu Kaljuste et You Must Believe In Spring de Bill
Evans… Que des chanteurs !
Quels livres ? Prodige
de Nancy Huston.
Quelles peintures ? Marc
Chagall.
Quels loisirs ? Des
loisirs manuels, comme le saxophone, mais pas volatil comme la musique !
Des loisirs concrets, palpables, durables (c’est mon côté terrien) : la menuiserie,
l’agriculture, la restauration de ma maison…
Les projets
Il y a d’abord
un nouveau trio avec Edouard Ferlet
et Kevin Seddiki. Ensuite, D’amour et de Folie, un projet très
excitant d’Yves Rousseau pour
saxophone soprano et chœur mixte, avec Microkosmos dirigé par Loïc Pierre. Et puis, un troisième opus
du Tarkovsky Quartet avec mon ami François Couturier.
Trois vœux…
1.
Egoïstement
: que le privilège de vivre de si précieux instants avec mes amis musiciens me
soit donné pour longtemps.
2.
Plus
généreusement : qu’il soit donné au plus grand nombre de gouter les délicieux
bienfaits que procure la musique…
3.
Et
d’avantage de musique pour un monde meilleur !