02 septembre 2018

A la découverte de Samy Thiébault

Depuis Blues For Nel (2004), Samy Thiébault a sorti un disque quasiment tous les deux ans : Gaya Scienza, Upanishad Expériences, Clear Fire, Feast of Friends, Rebirth et Carribean Stories (en septembre 2018). En parallèle, le saxophoniste a créé son propres label : Gaya Music Production. Partons à la découverte de ce jazzman philosophe et prolifique…


La musique

Mon père, pianiste amateur, professeur de physique en lycée et baroudeur invétéré, rêvait d’être saxophoniste, il m’a donc mit un saxophone entre les mains le plus tôt qu’il a pu ! Et la greffe a bien marché ! J’ai découvert le jazz à l’âge de huit ans en écoutant les vinyles de mon père – Duke Ellington et Fats Navarro – et en les jouant d’oreille avec lui au piano et moi au saxophone…

Je suis resté dans la pratique amateur très longtemps. J’ai d’abord travaillé le classique, puis le jazz au sein du Big Band de mon conservatoire et des jam sessions auxquelles je me précipitais adolescent. Le niveau y était extraordinaire car dans le modeste Bassin d’Arcachon, où je vivais à l’époque, de magnifiques musiciens venaient jouer dans un club hors norme : une pizzeria tenue par un surfeur doux rêveur... On pouvait y entendre et jammer avec Alex Golino, Vincent Bourgeyx, Manuel Marchès, Frédéric Couderc, Jérôme Etchéberry… Les locaux de l’étape ! Mais aussi avec Mark Turner, Johnny Griffin, Yannick Rieu, Simon Goubert… et j’en passe !

Ensuite, je me suis installé à Paris pour terminer mes études de Philosophie, mais je me suis inscrit en parallèle à l’IACP. C’est une école incroyable, dirigée de manière passionnée par les frères Belmondo. J’y ai beaucoup appris. C’est à ce moment que j’ai décidé de tout abandonner pour me consacrer exclusivement à la musique. Puis je suis rentré au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris pour y vivre quatre belles années... En sortant, j’ai tout de suite enchaîné les disques et les concerts. Je suis passionné de travail et touche du bois pour que je puisse continuer de pouvoir satisfaire cet appétit !

Pendant mon apprentissage j’ai été influencé par un nombre incalculable de musiciens et plus j’avance, plus la liste s’étend, car je me nourris d’éléments de plus en plus divers… En vrac, je citerais John Coltrane, Cecilia Todd, Louis Armstrong, Sonny Rollins, Dexter Gordon, Maurice Ravel, The Doors, toutes les musiques traditionnelles du Maroc et de l’Afrique de l’ouest, le Merengue dans toutes ses formes, le Calypso, Mark Turner, Lester Young… mais, décidément, la liste est trop longue…



Cinq clés pour le jazz

Qu’est-ce que le jazz ?  La musique du peuple : généreuse, exigeante et novatrice !

Pourquoi la passion du jazz ? Il émeut, parle aux sens les plus profonds et nobles de notre humanité.

Où écouter du jazz ? Tous les moments sont bons dès lors qu’on est « entré en musique » : assis religieusement au premier rang, au bar d’un club en parlant avec sa voisine ou son voisin, au fin fond du chapiteau d’un grand festival… C’est la force de cette musique !

Comment découvrir le jazz ?  Il faut aller l’écouter en live et, surtout, oublier tout ce qu’on a pu vous en dire avant !

Une anecdote autour du jazz ? La genèse de cette musique qui est l’une des premières traces de l’invention Créole. La culture Créole est la première culture au monde à s’être auto engendrée. Elle s’est créée de toute pièce à partir du mélange d’autres cultures, dans un contexte de violence indéniable, mais donc aussi d’amour.


Le portrait chinois

Si j’étais un animal, je serais un serpent. C’est lui qui a rendu le plus grand service à l’humanité !
Si j’étais une fleur, je serais un lotus. J’en ai des mètres de tatouages !
Si j’étais un fruit, je serais de la passion, forcément !
Si j’étais une boisson, je serais une Caïpiroska,
Si j’étais un plat, je serais une pastilla au pigeon,
Si j’étais une lettre, je serais J. C’est l’initiale du prénom de notre fils…
Si j’étais un mot, je serais Amour,
Si j’étais un chiffre, je serais 0,
Si j’étais une couleur, je serais bleu,
Si j’étais une note, je n’en serais aucune… Les notes ne valent rien : c’est leur interprétation qui compte.


Les bonheurs et regrets musicaux

Me lever tous les matins en apprenant quelque chose de nouveau est ce qui me comble et je n’ai aucun regret : les erreurs sont des étapes aussi nécessaires que les moments d’harmonie… Seul le chemin compte.


Sur l’île déserte…

Quels disques ?  Il y en aurait trop à emmener, donc je n’en prendrais aucun ! La musique de ce qui m’entourera résumera tous les disques que j’aurais pu emporter…

Quels livres ? Un seul : L’Iliade et l’Odyssée. On peut le relire éternellement en y découvrant à chaque fois toute la magie de l’Humanité dans son entièreté.

Quels films ?  Mmhhh… A supposer que a batterie de mon lecteur DVD tienne suffisamment longtemps, je dirais : Interstellar de Christopher Nolan.

Quelles peintures ? Quel exil luxueux ! Je dirais des toiles de Pablo Picasso, pour son interrogation constante.

Quels loisirs ? Nager… Evidemment !


Les projets

J’ai beaucoup de projets ! Aujourd’hui, c’est de jouer mon nouveau répertoire : Caribbean Stories sort le 21 septembre et je veux que nous nous surprenions sur scène, le public et nous-même, les musiciens… La musique dont je me suis inspiré et que nous revisitons est d’une générosité et d’une modernité renversante. Pour la faire vivre de la manière la plus expressive et inventive possible, il faut une grande préparation en amont. Et c’est ce à quoi je m’attèle tous les jours... Dans quelques mois une autre surprise arrivera, dans une direction très différente, mais je préfère ne pas trop en dire pour le moment, chaque chose en son temps…


Trois vœux…

1. Que l’humanité découvre très bientôt la coopération plutôt que la lutte...
2. Que ceux et celles qui veulent la coopération gagnent la lutte ! 
3. « Omnia vincit amor et nos cedamus amori » (Virgile… et Sense8 ! Ah ! Ah !).